Être pur jus

Publié le par Michel Durand

L’association culturelle établie selon la loi 1901 est un outil bien pratique pour rassembler diverses personnes dans un but commun. Cette liberté de s’associer est un réel et efficace élément de démocratie qui favorise le lien social et l’organise.
L’association cultuelle reconnue par les lois d’un État laïc a aussi son avantage. Celui de célébrer à plusieurs la liturgie qui correspond à ses convictions religieuses personnelles. Comme l’homme n’est pas que cultuel, il est bon de prendre en considération les inévitables alliances culturelles et cultuelles. En tout temps, la dimension religieuse de l’être humain s’est exprimée dans une culture particulière. Aussi, forcer une association, une assemblée, une Église à ne faire que du culte est contre nature. Profane et sacré se trouvent dans la même personne.
Pour respecter l’union de toutes les dimensions humaines, un service missionnaire d’Église a tout intérêt à utiliser les structures qui lui permettent d’entrer en dialogue avec la société.
En reprenant l’idée d’une image usuelle dans l’Église des premiers temps et bien connue grâce à la « Lettre à Diognète », je dis que l’association loi 1901 est comme un vêtement agréable à porter parce qu’il facilite les contacts avec les contemporains. Il met de plain-pied avec les organismes culturels que les hommes se donnent. Ils facilitent le dialogue. Animé par l’Esprit, le corps (la personne) qui porte ce vêtement reste lui-même. Il acquiert l’avantage, ainsi vêtu, de pouvoir s’adresser à toutes personnes y compris les représentants de la société civile « laïque » qui, par respect du droit « laïc », ne peuvent s’engager avec un groupe religieux.

Affiche de l'exposition réalisée  en partenariat  avec l'Eglise  catholique et l'Association Confluences.

En conséquence, c’est un outil bien pratique tant pour l’État que pour l’Église.
Ce qui m’étonne actuellement c’est de voir que c’est l’Église catholique qui se retire de ce vêtement associatif selon la loi 1901. Elle et non l’État qui la pousse à cela. Elle retire de ses services l’utile interface du dialogue et de la rencontre. Je le constate quand un cadre de l’Église dit, notamment à propos de Confluences, « vous n’êtes pas un service d’Église, vous n’êtes qu’une association loi 1901 ».
On pourrait trouver logique que l’État agisse ainsi quand il souhaite, tendance d'une laïcité étroite, que le religieux, le spirituel ne dépassent pas la sphère de la vie privée. Que les chrétiens restent dans leur sacristie ! Mais que l’Église se replie sur le culte seul est impensable au nom de la fidélité à l’Évangile. Mieux vaut aménager une loi, si elle pose problème, que de se supprimer l’usage d’un outil démocratique qui offre plein de possibilités de travail en synergie.
Que veut l’Église* qui se retire de la société civile et des possibilités qu’elle offre ?
Être une réalité « pur jus » ? Pas de compromission avec le monde, pas d’ouverture sur le monde, pas de contact avec des activités culturelles qui ne conduiraient pas directement à l’Église ou dont elle n’aurait pas la totale maîtrise…
Ne serait-ce pas le désir de retrouver une chrétienté qui n’est plus ?

*Les trois services d’Églises, fondateurs de Confluences, par ordre épiscopal, se sont retirés de cette association loi 1901. Le service de communication du diocèse de Lyon convoque une assemblée extraordinaire pour dissoudre son association loi 1901. L’institut de musique sacrée sera bientôt supprimé… Je ne cite que quelques exemples lyonnais. Je pense qu’il doit, à travers la France, exister des situations semblables.

Publié dans Eglise

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E
Je ne comprends pas : quelles sont les raisons données officiellement pour ces suppressions d'association loi 1901 ? Elles ont fleuri et rendu de grands services au sein de l'Eglise, pourquoi les supprimer ?
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M
Voilà c'est justement la question à laquelle il faudrait pouvoir répondre. N'y aurait-il pas tendance à une nouvelle valorisation du rôle "sacré" du prêtre qui place les associations "profanes" à distances ? Un déficit de démocratie, de concertation pour concentrer le pouvoir dans les mains des "princes". Le vocabulaire employé peut donné quelques indications. Les "régions" apostoliques furent récemment remplacées par les "provinces" avec une gouvernance beaucoup plus centralisé. Cela sonne ancien régime. Sauf erreur de ma part, le responsable de la région était élu alors que le provincial est nommé par Rome. Il nous faudrait ici entendre la voix d'un expert en droit canon. Mais un théologien peut aussi avoir son avis.