La résurrection des corps, résultat d’une filiation adoptive, n’est plus l’objet d’Espérance.
Après la fête du 15 Août, Assomption de la Vierge Marie, mais aussi date de la naissance de Napoléon Bonaparte, je prolonge ma réflexion sur les productions artistiques contemporaines. Elles sont le reflet des grands courants de pensée de notre société. Les artistes donnent à voir ce que nous pensons. En ce sens, il est tout à fait normal que les œuvres présentées pour la biennale d’art sacré actuel de 2009 sous le thème « Filiation », titre « par le Fils », demeurent majoritairement cadrées dans le domaine de la parenté humaine. On ne pense pas à une filiation possible en vue de la résurrection des corps comme l’entend la Révélation biblique avec le concept d’adoption. Par le Fils, engendré, non pas créé, le Père nous rend fils adoptif pour l’éternité. Sera-ce pour maintenant pour la fin des temps ? Mais nous avons vu (homélie de dimanche) que la fin n’est pas ce qui est après, mais ce qui commence maintenant avec u ne orientation précise, un sens (eschaton).
Le Titien, Assomption de la Vierge, Venise
Joseph Moingt, DIEU QUI VIENT À L'HOMME, p. 1056
« Pour les chrétiens d'aujourd'hui, la fin du monde est totalement sécularisée, comme elle l'est pour la plupart de leurs contemporains : elle est réduite, pour ce qui concerne les habitants de la terre, à la destruction de leur planète, elle ne dépendra pas de la décision soudaine et souveraine du Créateur de l'univers, elle ne sera pas la manifestation glorieuse du Fils de l'homme sur fond de cataclysme cosmique, elle est programmée depuis la formation de la nébuleuse qui a donné naissance à la terre, elle ne surviendra d'ailleurs que longtemps après l'extinction de l'espèce humaine et de la plupart des autres espèces végétales ou animales, due à l'épuisement des ressources naturelles, aux changements climatiques et autres phénomènes, dès maintenant prévisibles par la science, qui ont remplacé le «mystère» de la Fin. Les «menaces» qui pèsent sur l'humanité du XXIe siècle (ou sur son imaginaire ?) contribuent à «naturaliser» le processus de la fin du monde. La technologie permet peut-être de rêver (plus que de penser) une issue moins catastrophique (domination totale de l'univers par la science, exploration d'autres univers, découverte d'autres «espèces humaines » ... ), cela revient encore, et même davantage, à refuser l'idée d'une fin du monde par un acte de la souveraineté divine, sans lui substituer un avenir d'authentique humanisation. De toute façon, pour le croyant, la résurrection universelle des corps, rejetée dans un avenir qui échappe à ses perceptions du temps et de l'espace, n'est plus objet d'attente ni d'espérance ni de crainte, elle a cessé d'être pensable, puisqu'elle n'est plus identifiable en tant que terme et finalité de l'histoire humaine et que nos corps auront perdu dans les poussières cosmiques l'identité qu'ils tiennent des histoires individuelles vécues avec eux. L'impossibilité de la concevoir explique que la résurrection n'est plus envisagée par la plupart des chrétiens (par ceux qui ne lui ont pas substitué l'idée d'une «réincarnation », autre façon de fuir la pensée de la mort) que sous l'aspect de ce qui se passe après la mort, ainsi d'ailleurs que le dogme catholique les y invite :
le sort éternel de chacun est «fixé» dès le dernier instant de sa vie terrestre, et aussitôt commence la vie dans l'au-delà, de bonheur ou de peine, pour l'âme séparée du corps. Il ne s'agit donc pas d'une vraie résurrection, puisque l’âme est censée immortelle et que le corps retourne à la terre. »