Libre, libertin ; libéral ou libertaire... Tentative de clarification

libertine – libertinage – libre-échangisme
Ce vocable s'emploie pour désigner les modes de vie, les mœurs, les comportements affectifs et sexuels.
libéralisme – néolibéralisme – ultralibéralisme
On rencontre ce type d'appellation dans le domaine de l'économie. Mais j'ai également vu l'usage d'ultralibéralisme à propos de comportements sexuels ou affectifs.
Ce concept me semble surtout employé dans le domaine politique. Il est une nuance de l'anarchie. L'homme se veut libre de toute pression extérieure. Individu, libre, il est son maître.
La tendance individualiste de la poste modernité, renversant le personnalisme d'Emmanuel Mounier, issue des "Lumières" traverse tous ces courants anthropologiques.
Selon le vocabulaire politique, le libéral sera classé à droite (économie libérale) ; conservateur en morale individuelle vis-à-vis des mœurs et progressiste dans ses productions industrielles, domaine du capitalisme. Le libertaire sera à gauche, exigeant dans sa défense des citoyens contre les impérialismes ; laxiste pour toutes les questions concernant la morale individuelle ; domaine du socialisme.
Quant au libertin, il semble pouvoir se retrouver à gauche comme à droite.
La caractéristique commune à tous ces modes de vie, c'est que tous ne veulent aucune limite.
- pas de limite à mon désir de jouir
- pas de limite à l'accroissement de mon capital
- pas de limite à la maîtrise individuelle de mon être (mon corps).
L'esprit moderne refuse toute influence qui viendrait de l'extérieure, toute morale qui imposerait par sa transcendance une conduite. Seul le moi compte : la pensée personnelle, disons plutôt individuelle. "Faire ce que je veux, quand je veux, si je veux était, me semble-t-il le slogan touristique, ludique du Club Med. Il est bien la marque du comportement qui n'accepte rien d'autre que ce que l'individu – pas toujours raisonnable – décide. Primat des émotions hyper développées par les médias.
Autrement dit, nous sommes à tous les niveaux dans le refus radical de toute forme de transcendance. Refus du politique, refus du religieux , refus de la morale, car tout cela se présente comme des dogmes qui s'imposent la pensée individuelle et contraignent le libre arbitre. L'ultralibéralisme du XXIe siècle plonge des racines dans les philosophies libérales du XVIIIe siècle. Certes celles-ci s'avéraient nécessaires pour se défaire des tutelles d'un pouvoir patriarcal et royal absolu. Mais elles se donnaient des limites, des référents ; il était à cette époque impensable de nier l'idée d'un Dieu architecte, d'un Créateur premier laissant par la suite libre court à la créature. Aujourd'hui, de gauche à droite, seul compte l'individu individuel perçu dans son individualisme exacerbé. Il me semble que pour désigner cette tendance, on emploi, on pourrait employer le mot libérolibertaire.
Nécessaires limites
Je constate que, émanent des milieux favorables à toutes formes de liberté, des personnes prennent la parole pour désigner l'impasse du refus de toutes limites. Nous en avons parlé au cours du colloque de Chrétiens et pic de pétrole, christianisme et objection de croissance.
J'ai plusieurs fois cité sur ce blog Dany Robert Dufour. En économie et en politique, il paraît désormais évident pour certains qu'il faille des instances supra mondaines régulant les marchés qui ne peuvent être libres sans aucun discernement. Vouloir des limites, c'est reconnaître la place de la raison, l'importance de la hiérarchie des enjeux économiques, l'intervention de valeurs qui dépassent l'individu en donnant sens à l'humanité. Pour qu'une économie soit au service de l'homme, il est impossible de faire l'impasse sur les conséquences sociales de décisions purement économiques. Bref, il faut une métaphysique.
Reconnaître et mettre en place le transcendant vaut mieux que de se lamenter perpétuellement sur la perte des valeurs. J'entends effectivement trop souvent des conservateurs en moral privés, progressistes en économie dire : toutes les valeurs fondamentales sont oubliées ; il n'y a plus de valeurs.
Comment dans le monde sécularisé qui est le nôtre obtenir la reconnaissance d'une réalité qui nous dépasse tous ? Comment, hors références religieuses (puisque celles-ci ne sont plus universelles ou on perdu toute crédibilité) reconnaître que des limites s'imposent à l'encontre du désir de liberté sans bornes ? Le progressisme, le scientisme, le technicisme des chercheurs et des politiciens libérolibertaires conduisent l'humanité à sa perte. Quelle conversion les religions doivent-elles accomplir pour être entendues ?