Nous avons les moyens de résoudre ces problèmes, faire prendre conscience du danger sur le plan mondial, imposer de nouvelles règles
Danseur de la compagnie Melting Spot, Rodrigue Ousmane
Ce matin, j’ai longuement parlé avec Rodrigue Ousmane de N' Djaména. Et ce soir, j’ai regardé chez Viméo la chorégraphie dont il m’a parlé. Une merveille de tendresse, délicatesse et vérité. Voir ci-dessous.
Également aujourd’hui, j’ai reçu un courriel, un commentaire d’un article sur l’engagement militant en faveur d’une société autre, plus juste, moins polluante, plus fraternelle. Manifs, pétitions, courriers aux ministres n’apportent pas les résultats espérés. En effet, tant que la masse des gens ne sera pas consciente de l’importance des dégâts engendrés par la société capitaliste productiviste et consumériste, les décideurs continueront comme avant, dans le maintien de leur propre intérêt. Et les électeurs éliront des présidents qui maintiennent dans les impasses. Pour que cela change, disait le commentaire, ne faudrait-il pas que le théâtre, les arts en général s’emparent davantage de ces problèmes et les montrent au public sur scène avec humour, dramatisation, force, amour et beauté tragique ?
Je partage cette opinion. Les arts peuvent mieux transformer les idées, les convertir, que les discours militants. Disons que les deux modes d’action sont complémentaires, mais que, pour toucher les réfractaires, la sensibilité artistique est plus forte.
Le Bloc-note de Jean-Claude Guillebaud, du 9 janvier 20104 exprime clairement, l’aveuglement du plus grand nombre : « Depuis la chute du communisme, tout s’est passé comme si, en se rigidifiant, le capitalisme avait repris à son compte les dogmes les plus faux du système vaincu. Quelques exemples. L’arraisonnement de l’économie politique par les mathématiques a permis de prétendre que la théorie libérale sur la fameuse « efficience des marchés » était rationnelle, et ne pouvait donc être critiquée. Ce faisant, on réinventait le dogme du « socialisme scientifique ». La vulgate néolibérale, tel qu’elle est enseignée dans les écoles de commerce, se fonde sur cette crédulité. En réalité, l’économie consiste à user des moyens adéquats pour faire aboutir un projet, subjectif et éthique, c’est-à-dire démocratiquement choisi. Elle est l’exact contraire d’une science à laquelle on devrait se conformer. » Cela vaut le coup de lire l’ensemble de son texte.
Que de belle rencontre sur le parvis de l’église Saint-Polycarpe ! Dimanche dernier, le chorégraphe Rodrigue Ousmane s’est présenté à l’issue de l’eucharistie, pendant le rituel apéro. De passage à Lyon (il y vient souvent),il fit la connaissance de deux autres artistes nouvellement arrivés, musicien et plasticienne de Colombie.
Par la suite nous avons parlé d’écologie, du futur de la terre. Classique dans le quartier. Ce fut alors l’occasion d’évoquer le travail de Chrétiens et pic de pétrole, de son prochain colloque, dont je vous donnerai bientôt le programme.
Rencontre des arts et de l’acte militant pour que les mentalités se convertissent. En un sens, on demeure dans la ligne de la BASA 2013 ; Fragiles, l’homme, mais plein de force. Digne de changer de modes de vie.
N’est-ce pas à cela que nous invite Rodrigue Ousmane dont je suis heureux de vous communiquer le lien qui donne à voir son spectacle « Leda ».
Il en parle ainsi :
« Dans les années 80, la population de N' Djaména utilisait des sacs en papier non polluants pour ses achats. Depuis, ils ont été remplacés par des sacs plastiques noirs « le da » qui envahissent les caniveaux, les routes, les arbres, la ville tout entière.
Mes parents m’ont appris qu’au cours des années 50, les fleuves et lacs produisaient beaucoup de poissons de différentes espèces. Nous constatons aujourd’hui que beaucoup ont disparu à cause du tarissement des eaux et du rétrécissement des fleuves, suite à la dégradation de la nature, à l’action délibérée ou non de l’homme.
Au commencement, la nature était saine, harmonieuse. Lorsque la démographie est devenue forte, l’homme a occupé l’espace en agissant sur l’environnement. Il a développé en un temps record la technique et la science. Les moyens investis pour sa pleine suffisance détruisent aujourd’hui son habitat, rendent irrespirable l’air et dégradent l’écosystème en général. Le développement des armes de destruction massive, la diminution de la couche d’ozone, la montée des eaux ou la fonte des glaces constituent une menace sérieuse, susceptible un jour de faire disparaître l’humanité.
Pourtant, cette situation n’est pas une fatalité. Nous avons les moyens de résoudre ces problèmes, faire prendre conscience du danger sur le plan mondial, imposer de nouvelles règles aux États. Malgré les inégalités et les différences, la mondialisation nous rapproche et fait de nous les habitants d’un même village. Toutes les intelligences sont à utiliser : les scientifiques, les littéraires comme les artistes doivent annoncer et proposer leur contribution salutaire. Ce combat interpelle les noirs, comme les blancs, musulmans et chrétiens, jeunes et vieux, car nous avons comme seul héritage la Terre.
Sensible à ces problématiques environnementales et la manière dont elles sont traitées dans le monde et plus particulièrement dans mon pays ; il me tient à cœur de travailler sur cette thématique. »
Rodrigue Ousmane
Je vous invite à regarder son travail chorégraphique. À produire au cours d’un colloque d’intellectuels sur les dégâts du progrès.