Les fruits des JMJ ne sont pas à nier. Mais quelle place y est faite aux jeunes des milieux populaires ? La JOC est-elle une des priorités ?
eucharistie aux funérailles de Mgr Olivier de Berranger, lundi 29 mai 2017
Je prolonge le souvenir d’Olivier de Berranger en publiant les photos prises par Bruno au cours de la liturgie eucharistique marquant l’entrée dans l’éternité de la Résurrection. Beaucoup de monde ! Ce qui montre combien Olivier nous a marqués. Alors, en cette semaine où nous disons « à Dieu » à notre frère, exprimer ce que nous avons reçu de lui, tant par nos souvenirs personnels que par notre appartenance à la famille du Prado, importe, me semble-t-il.
Ainsi, dans la ligne des réflexions sur une pastorale de proximité que, je pense, nous devons mener dans la famille du Prado, pas seulement entre prêtres, mais avec tous les membres de la Famille pradosienne, je cite cette page d’Olivier qu’hier nous avons relu en équipe Prado.
Mais avant de se lancer dans la lecture de cette page, j’estime adéquat de lire l’homélie de l’évêque de Versailles, Eric Aumônier, à cette occasion.
http://saint-denis.catholique.fr/actualites/funerailles-de-mgr-olivier-de-berranger-eveque-de-saint-denis-en-france-1996-2009
« Dans la relecture de cette histoire d'un prêtre, trois aspects de la vie d'Antoine Chevrier sont à souligner. Le premier, qui va se confirmer dans l'étape suivante, c'est son amour non feint pour les enfants et pour les jeunes de milieu populaire. Peut-être n'était-ce pas sa vocation première, telle qu'il l'avait perçue la nuit de Noël 1856, mais je ne pense pas, comme cela a été dit, qu'il ait jamais utilisé l'apostolat auprès d'eux comme un « moyen » pour former des prêtres pauvres. Il a apprécié, à la Cité, l'importance de bien faire le catéchisme à ces jeunes, il s'est attaché à eux. Il sait les toucher parce qu'il les respecte et, avec Pierre, Amélie, Marie, leur donne la priorité sur les constructions.
Il ne se voit pas à la tête d'une œuvre, à la manière de Rambaud, c'est une affaire entendue, mais il paye de sa personne pour susciter parmi les jeunes, filles et garçons, de ces familles pauvres, des personnes et des chrétiens. Il n'a pas fait une analyse de l'industrialisation qui fabrique des pauvres, mais il ne peut rester passif et loin de ces derniers. Il faut qu'il s'engage à leur égard, sans savoir encore trop comment.
Est-ce que cela ne nous parle pas aujourd'hui encore ? En France, combien de fois n'entend-on pas dire : « Il n'y a pas de jeunes à l'église. » Mais quels efforts faisons-nous pour rendre l'Église proche d'eux ? Cela est vrai de toutes les couches sociales, mais particulièrement des milieux populaires. Les fruits des Journées mondiales de la Jeunesse ne sont pas à nier. Avec le temps, ces rencontres périodiques instillent une espérance pour la transmission de la foi et de la ferveur chrétienne. Mais, honnêtement, quelle place y est faite aux jeunes des milieux populaires ? Avec le soutien de la Jeunesse ouvrière chrétienne, cette place n'est pas nulle. Est-elle à la hauteur des priorités de l'Évangile ?
Le second aspect tient d'abord à la personnalité de Chevrier. Lui-même voit bien que le manque de confiance en soi le paralyse. Il faudra la pression d'amis, laïcs et prêtres - certains plus lucides que d'autres - pour sortir de son embarras et aller de l'avant. Mais il n'y a pas là qu'une affaire de tempérament. Ce prêtre, pour agir, veut s'assurer qu'il accomplit bien la volonté du Seigneur sur lui-même et la mission qu'il lui confie dans le temps. Il a justement besoin de temps, de prière, de consultation, d'un lent discernement, pour ne pas « courir en vain » {cf. Ga 2,2).
Sur ce point aussi, Chevrier est un maître. Plus les questions sont urgentes, et moins il faut se hâter pour y répondre, car alors on risque de tout gâter. L'œuvre de Dieu, et non la nôtre, ne peut naître que de la prière, comme Chevrier l'écrira plus tard pour les premiers séminaristes du Prado : « Quels sont ceux qui ont l'esprit de Dieu? », demande-t-il. « Ce sont ceux qui ont prié beaucoup et qui l'ont demandé longtemps. Ce sont ceux qui ont étudié longtemps le Saint Évangile, les paroles et les actions de Notre Seigneur, qui ont vu comment les saints agissaient et comment ils conformaient leur vie à celle de Jésus Christ, qui ont travaillé longtemps à réformer en eux ce qui est opposé à l'esprit de Notre Seigneur *. »
Le troisième aspect est moins une question pour nous qu'une interrogation sur le père Chevrier. Il a été parfois souligné, non sans raison, que ses liens à l'intérieur de presbyterium lyonnais ou grenoblois, n'étaient pas faciles. À l'archevêché de Lyon, on l'estimera. Mais y fut-il vraiment écouté et compris ? Nous tenterons de le dire par la suite. Une chose est sûre : il ne manque pas d'amis parmi les prêtres. Aujourd'hui, on parlerait d'un réseau. Pensons à Boulachon, Geslin, Rolland… Ce sont des personnalités reconnues, qui ont de l’envergure. Ces prêtres estiment Chevrier, communient à son idéal sacerdotal. Pourquoi donc, plutôt que de se tourner vers Rambaud et les capucins, ne les a-t-ils pas apparemment sollicités, eux, pour former avec lui cette association de prêtres pauvres dont il rêvait ? Cela fait parti de son secret.
Olivier de Berranger, Antoine Chevrier. Dis-nous ton secret, Parole et Silence, 2012.
Chevrier et nous aujourd'hui, p. 73.
* Le Véritable Disciple, Paris, Parole et Silence, 2010, p. 227.
Retenu par la maladie, Olivier n’a pu venir au rassemblement à Lourdes. Nous y avons reçu ce message enregistré en vidéo et transmis par internet. Merci à Philippe pour ce rappel.