A Jérusalem, la foule manifeste sa joie devant le Seigneur. Et moi, pour qui je manifeste ? Pour plus de justice, de vérité, de fraternité ?
Dans l’étude d’Évangile selon la méthode d’Antoine Chevrier, tel que je la perçois, la page est formée de trois colonnes. 1ère colonne, le texte à méditer ; 2ème colonne, les explications et commentaires que je trouve, les passages bibliques parallèles ; 3ème colonne, les décisions, appels à conversion et à action que je découvre dans cette méditation. Qu’est- ce que je décide de faire afin de mettre en pratique la parole entendue ? A ces trois “sections” s’ajoutent un “sous-bassement” en pleine page qui reçoit la prière que j’adresse à Dieu : Qu’agisse en moi ton Esprit ! Que vienne ton règne !
Aujourd’hui, je prends plaisir à rendre compte de mes pensées qui prennent place en cette troisième colonne. Les questions que je me pose présentement seraient celles que j’aborderais si j’avais une homélie à prononcer. En effet, selon mes connaissances, l’homélie n’est pas seulement un commentaire, une explication de la Parole entendue. Elle est aussi une proposition de mises en pratique de la Révélation. En théologie pastorale, je parlerai d’historisation, d’incarnation dans le vécu quotidien de la pensée exprimée en Jésus Christ. Que ta volonté soit faite.
A Jérusalem, la foule manifeste sa joie de rencontrer le Seigneur. Et moi, pour quoi, pour qui je manifeste ? Je « manifeste » pour plus de justice, de vérité, de solidarité de fraternité même. Les cercles de silence ouvrent, comme un cri de conscience, vers plus de respect de tout homme, dont l’étranger qui habite notre pays. Je manifeste pour que les immeubles vides accueillent les sans-abris. Je ne manifeste pas contre le mariage pour tous, la défense de l’école libre catholique. Pourquoi une foule immense se sentant tous Charlie et si peu de monde pour l’application du droit pour tous à un logement ? Je peux craindre que l’égoïsme lié à l’individualisme ambiant me fasse bouger pour la préservation de ma liberté personnelle, individuelle sans me soucier des conditions de vie d’autrui. Manifester résonne en moi comme un appelle à une conversion pour toujours plus de fraternité universelle.
Dans l’évangile du dimanche des Rameaux, les gens manifestent pour clamer leur joie de rencontrer un Libérateur. Ils adulent un personnage charismatique, Jésus qui soulage les gens de tous leurs maux et qui osent dire toute la vérité. Il me semble que l’on puisse comparer l’exaltation de cette foule à l’entrée de Jérusalem, à la foule des Français louant Charles de Gaule à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, ou au lendemain de mai 68, quand l’autre France descendit dans la rue. Je peux alors constater que je manifeste ma joie en faveur d’un libérateur, j’honore un chef quand celui-ci concrétise des idées et des actions qui correspondent à mes attentes. Or, quelles sont-elles ces attentes ? Mes attentes ? Protection de mon clan, de ma famille, de ma tribu… ou fraternité mondiale ? Vérité universelle et absolue ? Le drame du jour des Rameaux qui n’eut pas de suite favorable ne réside-t-il pas dans le fait que le foule voulait une libération de la domination romaine alors que Le Seigneur (Dieu) pense à toutes libérations. Jésus n’est pas le Roi qui libère de l’ennemi politique, économique, il est le Messie, l’ambassadeur qui libère l’homme de ses propres esclavages, ses péchés. Cette conversion a, bien sûr, une conséquence économique et politique. Le libérateur que nous sommes invités à aduler c’est Le Seigneur Jésus qui ouvre les portes pour que nous soyons en présence de Dieu. Que ton règne vienne !
Concrètement, pour moi, cela se traduit par un engagement encore plus fort dans une vie simple et sobre selon la pauvreté de l’Évangile. Les portes qui m’ouvrent l’accès à ce Domaine demeurent celles qui sont montrées par les objecteurs de croissance, qu’ils soient athées ou croyants en Dieu-Père. Toujours me convertir pour une approche de la Vérité encore plus authentique. Demeurer dans l’être plutôt que de se courber dans le faire. La joie des retraités !
Mais, je dois en venir à la lecture de l’Évangile de Marc 11, 1-10.
Lorsqu’ils approchent de Jérusalem, vers Bethphagé et Béthanie, près du mont des Oliviers,
Bethphagé (aujourd’hui, Kefr-et-Tür): village proche de Jérusalem, situé sur le flanc oriental du mont des Oliviers.
Le mont des Oliviers regarde le temple de Jérusalem. Marc (13,3),en parle dans un contexte apocalyptique qui fait songer à la fin des temps selon le vocabulaire de Zacharie :
14, 01 Voici qu’un jour vient pour le Seigneur, où l’on partagera tes dépouilles au milieu de toi, Jérusalem.
02 Je rassemblerai toutes les nations devant Jérusalem pour le combat ; la ville sera prise, les maisons pillées, les femmes violées ; la moitié de la ville partira en exil, mais le reste du peuple ne sera pas retranché de la ville.
03 Alors le Seigneur sortira pour combattre avec les nations, comme lorsqu’il combat au jour de la bataille.
04 Ses pieds se poseront, ce jour-là, sur le mont des Oliviers qui est en face de Jérusalem, à l’orient. Et le mont des Oliviers se fendra par le milieu, d’est en ouest ; il deviendra une immense vallée. Une moitié de la montagne reculera vers le nord, et l’autre vers le sud.
05 Vous fuirez la vallée de mes montagnes, car elle atteindra Yasol. Vous fuirez comme vous avez fui devant le tremblement de terre, au temps d’Ozias, roi de Juda. Alors le Seigneur mon Dieu viendra, et tous les saints avec lui.
06 Ce jour-là, il n’y aura pas de lumière, mais du froid et du gel.
Les disciples admirent le Temple. Jésus indique que cela n’est que provisoire
Marc 13
01 Comme Jésus sortait du Temple, un de ses disciples lui dit : « Maître, regarde : quelles belles pierres ! quelles constructions ! »
02 Mais Jésus lui dit : « Tu vois ces grandes constructions ? Il ne restera pas ici pierre sur pierre ; tout sera détruit. »
03 Et comme il s’était assis au mont des Oliviers, en face du Temple, Pierre, Jacques, Jean et André l’interrogeaient à l’écart :
04 « Dis-nous quand cela arrivera et quel sera le signe donné lorsque tout cela va se terminer. »
Cette demande des quatre premiers disciples, les premiers arrivés, le cercle étroit de Jésus (ses privilégiés) souligne bien le caractère de fin des temps : quand tout cela va-t-il arriver ?
Jésus envoie deux de ses disciples et leur dit : « Allez au village qui est en face de vous. Dès que vous y entrerez, vous trouverez un petit âne (ânon) attaché,
Ânon : allusion à l’oracle de Zacharie 9,9
9, 09 Exulte de toutes tes forces, fille de Sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici ton roi qui vient à toi : il est juste et victorieux, pauvre et monté sur un âne, un ânon, le petit d’une ânesse.
Évangile de Marc :
Dès que vous y entrerez, vous trouverez un petit âne (ânon) attaché, sur lequel personne ne s’est encore assis. Détachez-le et amenez-le. Si l’on vous dit : ‘Que faites-vous là ?’, répondez : ‘Le Seigneur en a besoin, mais il vous le renverra aussitôt.’ »
Le Seigneur : Ce texte est le seul, en Marc comme en Matthieu, où l‘expression Le Seigneur (avec l’article) soit employée pour nommer Jésus. C’est ainsi que les premiers chrétiens ont désigné le Christ ressuscité, alors que l’Ancien Testament réserve toujours ce titre à Dieu ou au Messie-Roi. Cette expression, Le Seigneur, est bien la preuve que les chrétiens voient Dieu en Jésus, comme le montrent les développements théologiques de Jean :
10, 30 Le Père et moi, nous sommes UN. »
33 Ils lui répondirent : « Ce n’est pas pour une œuvre bonne que nous voulons te lapider, mais c’est pour un blasphème : tu n’es qu’un homme, et tu te fais Dieu. »
36 Or, celui que le Père a consacré et envoyé dans le monde, vous lui dites : “Tu blasphèmes”, parce que j’ai dit : “Je suis le Fils de Dieu”.
37 Si je ne fais pas les œuvres de mon Père, continuez à ne pas me croire.
38 Mais si je les fais, même si vous ne me croyez pas, croyez les œuvres. Ainsi vous reconnaîtrez, et de plus en plus, que le Père est en moi, et moi dans le Père. »
La fin de l’évangile selon Marc
Ceux qui marchaient devant et ceux qui suivaient criaient : « Hosanna. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le Règne qui vient, celui de David, notre père. Hosanna au plus haut des cieux ! »
Citation du Psaume 117 /118, 25 - 26
21 Je te rends grâce car tu m'as exaucé : tu es pour moi le salut.
22 La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle :
23 c'est là l'oeuvre du Seigneur, la merveille devant nos yeux.
24 Voici le jour que fit le Seigneur, qu'il soit pour nous jour de fête et de joie !
25 Donne, Seigneur, donne le salut ! Donne, Seigneur, donne la victoire !
26 Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ! * De la maison du Seigneur, nous vous bénissons !
27 Dieu, le Seigneur, nous illumine. Rameaux en main, formez vos cortèges
jusqu'auprès de l'autel.
28 Tu es mon Dieu, je te rends grâce, * mon Dieu, je t'exalte !
29 Rendez grâce au Seigneur : Il est bon ! Éternel est son amour !
Le psaume est souvent évoqué à propos de la Passion et de l’exaltation du Christ. Comme l’avait prévu Jean-Baptiste, Jésus est celui qui vient inaugurer l’ère messianique. Le Seigneur vient dans son sanctuaire.
Malachie 3, 1
01 Voici que j’envoie mon messager pour qu’il prépare le chemin devant moi ; et soudain viendra dans son Temple le Seigneur que vous cherchez. Le messager de l’Alliance que vous désirez, le voici qui vient, – dit le Seigneur de l’univers.
Heb 10, 37
37 En effet, encore un peu, très peu de temps, et celui qui doit venir arrivera, il ne tardera pas.
Matthieu 3 11 ; 11, 2-6
11 Moi, je vous baptise dans l’eau, en vue de la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu.
Mt 11, 01 Lorsque Jésus eut terminé les instructions qu’il donnait à ses douze disciples, il partit de là pour enseigner et proclamer la Parole dans les villes du pays.
02 Jean le Baptiste entendit parler, dans sa prison, des œuvres réalisées par le Christ. Il lui envoya ses disciples et, par eux,
03 lui demanda : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? »
04 Jésus leur répondit : « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez :
05 Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle.
06 Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute ! »
En conclusion : Jésus inaugure l’ère messianique ; espérance de l’Accomplissement Que ton règne vienne.
Habacuq 2
01 Je vais me tenir à mon poste de garde, rester debout sur mon rempart, guetter ce que Dieu me dira, et comment il répliquera à mes plaintes.
02 Alors le Seigneur me répondit : Tu vas mettre par écrit une vision, clairement, sur des tablettes, pour qu’on puisse la lire couramment.
03 Car c’est encore une vision pour le temps fixé ; elle tendra vers son accomplissement, et ne décevra pas. Si elle paraît tarder, attends-la : elle viendra certainement, sans retard.
Certes, ces images de fin de temps ne sont pas très claires. Elles portent au doute -vingt siècles d’attente- dans un contexte 2015 de guerres aux soubassements de plus en plus religieux. Guerres saintes meurtrières d’un islam dévoyé. Guerre non moins meurtrière d’un Israël qui, selon le regard de Charles Enderlin*, appuie l’irrésistible ascension du messianisme juif ». Justement ce contre quoi luttait Jésus au point d’en mourir martyrisé.
* Charles Enderlin qui ne s'écarte jamais de son rôle d'observateur sans concession de la société israélienne raconte quatre décennies d’une dérive nationaliste et religieuse. Télérama