Montrons une fine attention à ce qui nous entoure et nous est donné de voir de si beau au fil des jours qui font nos vies. Contemplons. Admirons
Nous sommes dans la pandémie comme dans un navire et nous arrivons au port. Nous nous ouvrons à autrui, à toute vie. Nous accueillons et nous donnons.
Pensant à cela - action de grâce - je relie une page de Jean-Marie Delthil que le hasard des découvertes place à côté de ceci : « L'eucharistie, source d'amour pour la vie de l'Église, est une école de charité et de solidarité. Celui qui se nourrit du Pain du Christ ne peut pas rester indifférent face à ceux qui n'ont pas de pain quotidien ». Tweet de Fançois, évêque de Rome, une pensée qui a bien sa place à la suite de ma page du 31 mai.
Voilà… nous voici donc au sortir de l'épreuve : de ces grands rouleaux de mer incessants, visiblement destructeurs « qui ne purent absolument rien contre nous » tant nous étions bien sagement et amoureusement guidés…
Puis vint le havre, la crique, jaillie d'un coup, en un instant – sans bien même que nous l'eussions imaginé ou bien même espéré.
Quelle merveille !... J'y ai souvent repensé depuis lors.
Et venons-en aux arbres si vous le voulez bien, à ces très très grands arbres qu'il m'était impossible, par les fenêtres de la passerelle de notre navire, de voir en leur totalité – il me fallut donc incliner le buste, la tête, me baisser, adopter un geste simple et une posture qui fut d'humilité..., pour être en mesure de les saisir d'un seul regard.
Ensuite, oui, je pus donc les voir et les admirer tout entiers, à loisir : ils se perdaient presque en une brume d'altitude très fine et très légère, tant ils étaient de haute taille.
Très lentement et de manière à peine perceptible, ils se balançaient.
Leurs troncs, curieusement presque dépourvus de branches, étaient lisses, à la peau vaguement brillante et claire – mais j'étais bien là en présence d'espèces végétales tout à fait vivantes, et comment !
Il y a quelques jours, il m'est revenu subitement un souvenir du tout début de ce printemps : en promenade, comme ça, je m'étais soudainement collé – presque amoureusement pourrait-on dire – tout contre un bel arbre de Puisaye. Il était lui aussi, et en raison de la saison encore peu avancée, dépourvu, non pas de branches, mais de feuilles : ce qui lui avait donné également cette allure étonnante, un peu manchote et élancée ; et fait plus surprenant encore, ayant collé mon visage et mon œil tout contre l'écorce de mon compagnon de virée, je vis et perçus très nettement ce petit balancement, cette douce oscillation allant s'accentuant en filant vers la cime ; cette grande ossature de bois, tirée et bien tendue droite vers le ciel, oscillait et dansait très légèrement sous un faible vent de printemps.
Il m'avait fallu cinquante-quatre ans pour découvrir ce genre de choses somme toute élémentaire, comme quoi…
Pour en revenir un peu plus précisément à ce qui nous intéresse, et vous l'aurez compris : le Réel de nos vies éveillées (et en éveil, souhaitons-le !) nourrit véritablement le Continent et les plages des rêves, nous le savons – alors pourquoi ne pas, et c'est bien ici où je voudrais en venir… pourquoi ne pas montrer une plus fine attention à tout ce qui nous entoure, à ce qui nous est donné de voir, et de si singulier, et de si beau, au fil des jours qui font nos vies ?…
Il nous faut admirer !
Chercher un peu, mais surtout admirer...
C'est tellement important… Que savons-nous des jours, des mois et des années qui feront encore nos vies et notre avenir : seront-ils paisibles et sûrs ? Ou bien agités, malmenés et dangereux ?... Nous n'en savons absolument rien, vous comme moi – alors, ayons au moins l'humilité (nous y revenons, finalement) de nous reconnaître comme étant finalement petits, fragiles, dépendants de bien des choses, de bien des circonstances, de bien des événements et de bien des personnes ..., et ayant (ayons) pour tout dire grand besoin et grande nécessité de nous nourrir et de faire provision de nombreuse oasis de beauté, de bonté et de grâce, pour traverser ce qui peut parfois être, et par moments, le grand Désert de nos vies.
On a pu parler d'eau et de pain pour le voyageur accompli.
Contemplation.
Admiration et gratitude…
Jean-Marie Delthil. Bonny-sur-Loire, le 8 juillet 2018