Il demeurait encore une cheminée adossée sur le pignon de gauche de l’édifice, son linteau d’un seul tenant était encore en place.

Publié le par Michel Durand

Il demeurait encore une cheminée adossée sur le pignon de gauche de l’édifice, son linteau d’un seul tenant était encore en place.

Source de l'image

Promenade pour un temps de vacances. Promenade imaginaire ou réelle.

Savoir sortir de ses sentiers ordinaires, à l'écoute de Jean-Marie Delthil.

Les pierres.

 

La maison aurait pu sembler misérable – et elle l’était, d’une certaine façon, d’une certaine manière – je m’explique.

Je me trouvais sur une région côtière qui aurait bien pu se situer en Irlande, ou alors en Écosse, et plus au nord encore… deux trois personnes m’accompagnaient, dont je n’ai plus véritablement le souvenir ici.

L’endroit était donc rude ; on l’imaginait fréquemment bien battu par les vents.

Là, tout était calme.

Je marchais plus ou moins en bordure de ce littoral qui n’avait rien de charmant, de beau, ni même d’attrayant, si vous voulez tout savoir… et puis, étant parvenu à une sorte de digue qui se trouvait située directement face à la mer, je vis sur ma gauche, à moins de 10 mètres, une maison en contre-bas, bien abritée, pourrait-on dire.

Toutefois, elle ne l’était pas, et nullement, puisque son propre toit avait tout bonnement disparu, fondu aux vents forts et aux seaux si fréquents versés de par le ciel – bref : le lieu était une ruine que l’on imaginait délaissée par ses habitants depuis fort longtemps, ou un certain temps déjà.

Je laisse la digue de protection... descends une volée de marches bien taillées dans la pierre, puis je poursuis par une légère pente en herbe et curieusement entretenue ici.

Quelques mètres encore, et j’atteins la maison ; ses quatre murs bien ouverts sur le ciel.

C’était ici un peu comme une sorte de longère : une dizaine de mètres sur sa plus grande dimension ; 4 ou 5 mètres, tout au plus, sur sa simple largeur.

Le haut des murs, fait de granit, avait chuté, et commençait à remplir copieusement l’édifice devenu vide.

De meubles, il n’y en avait plus, bien entendu ; il demeurait encore une cheminée adossée sur le pignon de gauche de l’édifice, son linteau d’un seul tenant était encore en place.

Sur la droite, et au sol : un vieux poêle de fonte noire éventré, brisé par quelques pierre ayant dégringolé.

Bref : que faisais-je donc ici ; n’avais-je pas d’autre endroit à aller visiter ?… en l’occurrence – non.

La place m’avait irrésistiblement attiré, tout comme l’aiguille d’une boussole est tendue vers le nord, mais avec toutefois ce sentiment de liberté qui ne me mentait pas.

J’étais au bon endroit.

Il me fallait tout simplement être là – et j’y étais.

De mes compagnons premiers, je n’avais alors plus de souvenir.

J’étais seul – mais non plus seul… en effet, sitôt « entré » dans ce qui restait du bâtiment, je ressentis aussitôt comme un accompagnement ; le mot n’est pas exact… comme une grande bienveillance versée à mon égard, tout spécialement pour moi.

Et pourquoi donc ?… vous allez le savoir : moi qui n’ai, à proprement parler, aucune racine familiale connue et issue de ces parages, je ressentis curieusement – et finalement le plus naturellement du monde – le fait que ce lieu avait abrité plusieurs générations de personnes que l’on dit laborieuses : et c’était mes aïeux, mes très lointains aïeux, remontant jusqu’à la nuit des temps, pourrait-on dire.

En somme, je sentais et ressentais qu’ici, en l’occurrence, s’étaient succédées des générations de ma très ancienne famille… des personnes ayant eu des vies plus que rudes et difficiles, bien souvent dangereuse eu égard au fait que la culture, ici, ne suffisait pas toujours pour vivre, et qu’il fallait aller en mer.

Et le plus profond que j’avais à vous dire, était ceci : que je ressentais, dans ce champ de désolation et de décrépitude, de l’Amour… un indescriptible Amour perceptible en ces quelques pierres vaguement maintenues debout, en ce sol de terre battu et jonché de débris, en ce ciel malmené et changeant – et bien plus largement encore : partout.

Le plus simplement du monde : partout.

Rêve d’il y a quelques nuits.

 

Bonny-sur-Loire, le 27 juin 2022. Jean-Marie Delthil.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article