Que l'Église catholique, orthodoxe se considèrent, chacune à elle seule, comme l'Église universelle a un effet discriminatoire inacceptable
Christoph Theobald, la page de Bernard sur le chapitre XXI. Voir le texte précédent.
Ce texte commence par une mise en avant de l’opportunité des Eglises différentes. « opportet haereses esse » de Paul (1 Cor 11, 19) Comment développer cette idée : Par la prière, par une ecclésiologie synodale ? Cela passe par un recadrage de Vatican I et du dogme de l’infaillibilité pontificale.
La pluridimensionnalité de la tradition chrétienne est révélée progressivement par l'échange œcuménique. Elle peut s’intégrer dans une grammaire œcuménique de la tradition chrétienne. C’est l’identique qui est différent car lié à la dimension culturelle. très frappé par l'importance prépondérante (et même irrésistible) des facteurs non strictement théologiques (mécanismes historiques, sociaux et culturels) par rapport aux questions "purement rationnelles" (explicites et conscientes) » et plaidant pour un « travail sur ces "inconscients collectifs » À une condition cependant : qu'aucune Église ne prétende au monopole de l'ecclésialité ou ne nie l'ecclésialité de l'autre, quelles que soient les conversions à opérer de part et d’autre », Vatican II insiste sur la relativité pastorale et œcuménique de toute doctrine.
Le baptême unique est reconnu. Mais cette incorporation au Christ ne risque-t-elle pas d’être limitée. « ou bien l'Église catholique reconnaît trop facilement le baptême des autres communautés chrétiennes, ou bien elle ne tire pas toutes les conséquences de cette reconnaissance. L’Eglise orthodoxe n’est pas plus cohérente sur ce point. L’enjeu théologique est le respect des limites de l’Église. Son pouvoir ne s’étend pas aux fondements de l’existence chrétienne. Ensuite il y a le lien de corps et de cœur qui conduit à définir l’appartenance à une église par la charité.
Que l'Église catholique ou l'Église orthodoxe se considèrent, chacune à elle seule, comme l'Église universelle a un effet discriminatoire inacceptable aux yeux des autres Églises qui se sentent, par le fait même, exclues de l'Église universelle (non nécessaires à la réalisation de celle-ci) et donc niées dans leur véritable ecclésialité : divergence radicale. Réciproquement, sur un plan pratique et théologique, un sens insuffisant de l'universalité ecclésiale crée aussi une divergence sérieuse avec les traditions catholique romaine et orthodoxe
Le point d’achoppement est le dogme de Vatican du primat de juridiction du Pontife romain et de son infaillibilité doctrinale, pièce maîtresse de l'ecclésiologie grégorienne. « Ne pourrait-on voir dans les canons de l’édit de Sardique (concile prévu au 4ème siècle pour réconciler les évêques nicéens essentiellement occidentaux et les évêques ariens orientaux et dont les canons deviennent la pièce maitresse de la primauté romaine) une figure d'articulation de la communion entre Orient et Occident dans une perspective créatrice d'avenir, qui n'opère pas un retour purement archéologique au premier millénaire, mais tienne compte des exigences propres de notre époque planétaire.
Il serait utile de s’accorder sur une interprétation de ce que les Ecritures disent de la suprématie pétrinienne. Il y aurait une lecture théologique de l'histoire commune à élaborer, pour y situer les bienfaits et les méfaits, la fécondité et les déviations de l'exercice de la fonction pétrinienne ni idéologique ni apologétique.
La reconnaissance par tous que l'Église de Rome et celui qui la préside exerce(nt) la fonction pétrinienne de l’« ultime recours » nécessiterait la « définition » positive d'une distinction entre l'infaillibilité de l'Église tout entière et une infaillibilité pontificale. Le concile Vatican II a fait de grands pas dans ce sens en renonçant à l’ecclésiologie « société parfaite » mais il y a des seuils qu’il n’a pas su franchir.
Par son ecclésiologie grégorienne et son interprétation « souverainiste » de la fonction pétrinienne l’Eglise latine a rendu impossible le recours pour les églises locales. A titre d’exemple et c’est une fiction l’actuel scission entre l’Eglise de Moscou et celle de Constantinople pour donner suite aux ambitions conquérantes de Moscou sur l’Ukraine pourrait trouver un recours (c’est une fiction) auprès de l’autorité pétrinienne (Rome)
Chaque Eglise a quelque chose à convertir et est interpellée au nom de la fidélité à Jésus Christ et à conserver l’unité dans ce qui est nécessaire : la charité. On peut se demander si l’Eglise de Rome peut parler d’universalité et dans cet esprit parler dans un concile des églises orientales. La question du patriarcat n’a pas été suffisamment abordée. Ce qui serait bien c’est de se demander si l’Eglise de Rome ne peut pas s’organiser (se diviser) en plusieurs patriarcat et de prôner une version non-maximaliste du ministère pétrinien.
Il reste cependant que le principe territorial est plus que jamais pertinent en raison de la mondialisation et du nomadisme qu’elle provoque. Une diversité d'évêques et de structures ecclésiales n'est pas forcément incompatible avec l'unité des chrétiens, pour peu que cette diversité ne soit pas réalisée sous le mode de juxtaposition d'évêques portant les mêmes titres et d'une superposition de structures parallèles [254].
Ainsi est-il envisagé la perspective finale de l'unité visible comme célébration d'une réconciliation ; perspective « pénitentielle », fondée sur le baptême « commun » à tous. Le désir de pénitence devra trouver son accomplissement grâce aux « pasteurs réunis dans un véritable concile œcuménique de réconciliation »