ETRE OPTIMISTE DANS UN MONDE QUI AGONISE ? - 1
L'optimisme étrange des économistes.
Vous me demanderez, bien sûr, de fournir la preuve de l'agonie de notre monde. Serait-il suffisant de répondre que nous n'avons qu'à regarder autour de nous ? Etant entendu que cet "autour de
nous" n'est pas celui de son petit milieu ; j'allais dire de sa secte, de son monde maintenu dans l'harmonie grâce aux habitudes que personne ne veut observer de près. Ce serait dangereux pour
ses privilèges ou, tout au moins, pour le confort du "tiroir" capitonné dans lequel on s'est installé. Ah! soyons moins violents que Clavel. Nous pouvons nous accorder, sinon sur l'ultime agonie
de notre société, du moins sur sa maladie.
Dans cette situation morbide, il en est qui, d'un optimisme inouï, ne tarissent pas de solutions. Il suffit, par exemple en économie, de jouer avec tel ou tel "poste" et tout ira bien ! Ce n'est pas compliqué. On ne peut redistribuer que ce qu'on a gagné. Il faut alors augmenter les gains... me voilà encore en pleine caricature, sûrement du mauvais dessin.
Quand l'économie devient économisme et que, à cause de cela, elle oublie l'homme, que devons-nous penser ? Faut-il tout tenter pour remettre un "humanisme" à sa place ? Est-ce regrettable que nous ne trouvons plus actuellement, dans les organismes spécialisés de recherche et de formation, la flamme toute humaine d'un Lebret et d'un Folliet ? Le sens profond de l'humain est-il oublié ? D'après ce que nous constatons, par témoignage et directement, il semblerait inévitable que l'intuition d'un fondateur ne puisse se retrouver intégralement ni dans les successeurs, ni dans les institutions mises en place. N'empêche que cela pose question.
Ainsi, à l'Institut des Sciences Sociales Appliquées (I.S.S.A.) des Facultés catholiques, je n'arrive pas à voir, à travers les enseignements qui sont donnés, une science qui se montrerait d'emblée au service de l'homme. Ecrivant cela, je ne veux pas dire que, dans la pensée des enseignants ce souci humain soit absent. Non, ce serait trop fort. J'affirme seulement que, derrière ce qui est devenu un système politico-économique, je n'entrevois pas assez clairement en quoi cette recherche répond à un besoin, à un désir de l'homme, des hommes.
Avec certains professeurs, nous nous sommes essayé à un dialogue atteignant cette profondeur philosophique. Pour ne pas dire que cela fut un échec, avouons au moins que cela ne fut pas très brillant. Les "Maîtres" possesseurs du savoir, quand ils ont le pouvoir n'acceptent pas vraiment qu'un "débordement" d'idées vienne de la "base". C'est bien connu. Et je crois même que la personne dans son évolution demeure fondamentalement étrangère à cette forme de fatalité. Celui qui devient "chef" revêtira tous les attributs du dirigeant, du maître alors que, peu de temps auparavant, il exigeait qu'on écoutât pleinement ses suggestions ou revendications de subordonné. Pour avoir été, moi-même, quelque temps, responsable de communautés paroissiales je comprends concrètement, qu'en un certain sens, la fonction fait la personne. Un changement de place dans la structure hiérarchique invite bien souvent à retourner sa veste. C'est encore bien connu.