Décroissance

Publié le par Michel Durand

Je reçois un texte de Sébastien Giorgis, il se place dans les études portant sur la décroissance.
Qu’en pensez-vous ?

Sept thèses en guise de conclusion
 
Les analyses partielles qui forment cet essai ont permis d’aboutir à quelques conclusions. Je vais essayer de les énoncer succinctement sous forme de thèses, puis de leur donner une illustration utopique.
 
1. La crise actuelle du capitalisme a pour causes un surdéveloppement de capacités de production et la destructivité, génératrice de raretés insurmontables, des techniques employées. Cette crise ne peut être dépassée que par un mode de production nouveau qui, rompant avec la rationalité économique, se fonde sur le ménagement des ressources renouvelables, la consommation décroissante d’énergie et de matières.
 
2. Le dépassement de la rationalité économique et la décroissance des consommations matérielles peuvent être réalisés par hétérorégulation technofasciste, aussi bien que par l’autorégulation conviviale. Le technofascisme ne sera évité que par une expansion de la société civile qui, à son tour, suppose la mise en place de techniques et d’outils permettant une souveraineté croissante des communautés de base.
 
3. Le lien entre « plus » et « mieux » est rompu. « Mieux » peut être obtenu avec moins. On peut vivre mieux en travaillant et consommant moins, à condition de produire des choses plus durables  qui n’engendrent ni nuisances ni raretés insurmontables dès lors tous y accèdent. Seul mérite d’être produit socialement ce qui reste bon pour chacun quand tous en jouissent – et inversement.
 
4. La pauvreté dans les pays riches a pour cause non pas l’insuffisance des productions mais la nature des biens produits, la manière de les produire et de les répartir. La pauvreté ne serra supprimée que si on cesse de produire socialement des richesses rares, c’est-à-dire réservées et exclusives par essence. Seul mérite d’être produit socialement ce qui ne privilégie ni n’abaisse personne.
 
5. Le chômage dans les sociétés riches reflète la diminution du temps de travail socialement nécessaire. Il montre que tous pourraient travailler beaucoup moins à condition que tous travaillent. L’égale reconnaissance et rémunération sociale de tous les travaux socialement nécessaires est la condition à la fois de la suppression de la pauvreté et de la répartition du travail sur tous ceux qui y sont aptes.
 
6. Le travail social étant limité aux productions socialement nécessaires, la réduction du temps de travail pourra aller de pair avec l’expansion des activités autogérées et libres. En plus du nécessaire qui leur est assuré par la production sociale, les individus pourront créer durant leur temps libre, seuls ou collectivement, tout le superflu qui leur paraît désirable. La production d’une variété illimité de biens et services dans les ateliers et coopératives de voisinage assurera l’expansion de la sphère de la liberté et le dépérissement des rapports marchands ; l’expansion de la société civile et le dépérissement de l’État.
 
7. L’uniformité du modèle de consommation et de vie disparaîtra en même temps que les inégalités sociales. Les individus et les communautés se différencieront et diversifieront leurs styles de vie au-delà de ce qui est aujourd’hui imaginable. Leurs différences seront toutefois le résultat des emplois différents qu’ils feront de leur temps libre et non de l’inégalité des rémunérations sociales et des pouvoirs. Le déploiement des capacités autonomes durant le temps libre sera la seule source des différences et des richesses.
 
Pour illustrer ces thèses, voici une utopie parmi d’autres possibles. Les thèses ci-dessus peuvent recevoir des traductions différentes de celle qui est ici suggérée. Elle n’a d’autre but que de libérer l’imagination quant à ce qu’il est possible de faire pour changer la vie. “

André Gorz, dans “Ecologie et liberté” en 1979 !
Je vous conseille de (re)lire ce petit essai de 114 pages, (ed. Galilée), très clairvoyant et perspicace dans l’analyse de ce monde naissant dans lequel nous sommes “en plein” aujourd’hui. Une seule (grosse) fausse note, son “utopie” finale est un remake de 1984 (Orwel), à faire froid dans le dos (ou sourire) sauf que pour Gorz, ça n’est pas une allégorie ni de l’humour...
Sébastien Giorgis

Publié dans Politique

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