J’évoque un souvenir pour parler de la formation sacerdotale que nous recevons. Pouvons-nous au « séminaire » éviter un futur clérical ?

Publié le par Michel Durand

J’évoque un souvenir pour parler de la formation sacerdotale que nous recevons. Pouvons-nous au « séminaire » éviter un futur clérical ?

source de l'image d'illustration

 

Il m’arrive, assez souvent me semble-t-il, de penser à la formation que prêtres nous recevons. J’imagine aussi que l’idée de vocation - se sentir ou se savoir appelé - risque de placer l’appelé à la prêtrise (vocation sacerdotale) sur un piédestal. C’est dans ce contexte de réflexion que j’ouvre cette page.

Ainsi, en ce blogue, ou dans d’autres écrits, j’ai exprimé à diverses reprises qu’après les années passées à Rome au séminaire français, à l’université pontificale grégorienne, je n’étais pas vraiment apte à comprendre les chrétiens du Creusot, ville où je fus nommé comme vicaire, juste après mes études. Le curé qui m’a accueilli dans son presbytère l’a fait avec ces mots : « j’ai demandé un animateur en colonie de vacances, on m’envoie un théologien ». Cela ne m’a pas fait plaisir. D’abord, je ne suis pas théologien. Ce ne sont pas les années passées à se former qui façonnent un théologien mais le désir ou la capacité de l’être. Mes premiers pas dans la vie active furent ceux du pasteur, du missionnaire, de l’apôtre.

Aujourd’hui, avant d’être actif dans cette ville ouvrière, je pense que j’aurai dû suivre une formation de deux ou trois mois pour comprendre, entre autres, la réalité du paternalisme. Le paternalisme ?

De nombreuses années après avoir quitté Le Creusot, des amis, à Lyon, me donnèrent à lire « Les dames du Creusot », de Charles Exbrayat. C’est un roman policier qui parle de cette ville et de ses habitants tels qu’ils sont. Le respect pour la famille Schneider est mémorable. Eugêne, Henri, Charles donnent leur nom aux quartiers, aux églises, aux écoles et aux cimetières. Ils « protègent » de À à Z toute la population.

Qui oserait interroger ce brave paternalisme ? Bref, en ce temps de longue révision de vie propre à l’âge de la retraite, je regrette de ne pas avoir été à l’école pratique de la découverte des mentalités creusotines qui étaient dans les années 1970 bousculées par des travailleurs - ouvriers ou ingénieurs - venant d’autres villes, d’autres écoles avec des sensibilités différentes de celles des enfants Schneider. On nait dans une maternité Schneider et on meurt dans un cimetière Schneider.

Donc, j’évoque ce souvenir pour parler de la formation sacerdotale (presbytérale) que nous recevons. Pouvons-nous avec ce type de formation déconnectée éviter toutes formes de cléricalisme ? J’en doute. La spiritualité sacerdotale, l’accompagnement sous forme de direction spirituelle n’oriente-t-il pas vers un mode de gouvernance imprégné de cléricalisme ?

Je ne fais que poser la question même si j’aurai tendance à affirmer qu’avec ce type de formation, nous ne pouvons qu’avoir des comportements cléricaux. Enfin, c’est à discuter. Entrons dans le débat.

Il me semble avoir vécu la gouvernance de mes initiatives pastorales sous le mode circulaire. Je pense même pouvoir dire que j’ai toujours conçu les relations avec autrui sous la forme de l’échange, du dialogue, de l’entente. Autrement dit, je ne me vois pas comme le chef qui entraine les autres, qui agit avec autorité. C’est plutôt l’image d’une chorégraphie spontanée qui expliquerait mon mode d’action. Chacun agit librement, créant avec autrui des interactions donnant à voir et à entendre un spectacle harmonieux. Je dis cela tout en reconnaissant que le mode d’action spontanée exige au préalable un immense et dure labeur de préparation. Il n’y a pas d’improvisation possible, sans un réel travail, personnel et collectif, préalable.

Le mode circulaire de gouvernement exige ce temps personnel de recherche préalable. Les membres d’un collectif qui envisage une action commune se rendent à la réunion en ayant étudier à fond le projet envisagé. Chacun développe la connaissance de ce qui est à entreprendre. La parole circule. Chacun donne son avis. Le projet est affiné. Peu à peu, on se dirige vers un consensus. Arrive alors le temps de la décision. Celle-ci, une fois prise, s’il demeure encore possible d’améliorer l’action engagée, il n’est plus possible de tout remettre en cause. Émanant du travail accompli à la base par tous, personne ne peut en modifier l’exécution. Si un évènement inconnu jusqu’alors intervenait, il faudrait tout reprendre.

Si dans la société civile, on parle à ce propos d’autogestion, de cogestion, en Église on évoquera les mots de synode, de synodalité, de communauté. La marche ensemble des membres d’une famille reconnaissant un unique Père, Dieu créateur.

À ce mode circulaire de bonne gouvernance, j’oppose le mode pyramidale. C’est d’en haut, du sommet de la pyramide, que se prennent les décisions. Un « Prince » les dicte à la base qui doit exécuter. L’échange qui peut avoir lieu pour mettre en œuvre ce qui est demandé ne sera que des ajustements pour que soit effectivement appliqué l’ordre émis. Le cléricalisme baigne dans ce profil vertical.

Le concept d’autoritarisme sera employé dans la société civile. Domaine des abus de pouvoir propre au régime dictatorial.

Bref, je pense en avoir assez dit pour ouvrir un éventuel débat contradictoire.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article