Ça va changer !

Publié le par Michel Durand

CA-VA-CHANGER.jpg

Tramway, il n’y a pas plus d’une demi-heure, je vous cite à peu près de mémoire :

— (moi) « Salut Angelina, comment va ?! »

— (elle) « Oh… ça va, pff… — et toi ? »

— « Moi, ça va à peu près… mais le monde, nos sociétés ?!... Comment ils vont ? C’est peut-être ça qu’il faudrait vraiment se poser comme question… »

— « Oui…»

— « Tu sais, il n’y a rien de séparé. C’est une illusion de se dire qu’on est séparés des autres… on n’est pas séparés des autres dans notre Monde — je crois que quand on aura compris ça, on aura vraiment avancé… »

— « … »

— « On ne peut pas ‘s’en sortir’ tout seul Angelina, sans les autres, ce n’est pas possible… »

— « Oui… »

— « C’est dur en ce moment, t’as vu : la Tunisie… pas mal de pays d’Afrique Noire aussi, depuis tellement longtemps pour eux…, et puis ici en France dans une moindre mesure, et dans d’autres pays encore — on souffre, on est beaucoup à souffrir !... »

— « Oui »

— « Et les responsables politiques, financiers, économiques, ils le savent… »

— « Bha bien sûr qu’ils le savent ! et ils laissent faire, et au contraire même, ils se durcissent, ils durcissent leurs positions ! »

— « Oui, en fait ils ne changent pas, malgré tout ce qu’on nous dit, ils ne changent pas… »

— « Oui »

— « On en est à un point où ça va bouger, peut-être pas dans la violence, mais ça va bouger, globalement, tout d’un coup et sur toute la planète — moi je pense que c’est d’un point de vue planétaire que ça doit et que ça va bouger —, c’est impossible que ça continue comme ça encore longtemps, c’est même étonnant que ça ait duré aussi longtemps comme ça, dans l’injustice, et dans tellement de pays !... »

— « Oui, espérons, espérons que ça bouge, mais que ça bouge vraiment…, moi je pense aux jeunes… »

— « … Aux jeunes, et aux vieux, et aux personnes de notre âge aussi Angelina — il ne faut pas séparer, pour quoi vouloir séparer, séparer les âges, les personnes, hein ? On a tous à y gagner avec le changement — ensemble ! »

— « … Oui, tu as raison… »

Dans la rame, une jeune femme est assise juste face à moi, son visage est de marbre, elle entend, elle n’a absolument aucune réaction (je n’y fais pas plus attention que ça) ; sur ma gauche, deux hommes d’origine maghrébine sont assis l’un à côté de l’autre, impassibles, silencieux, ils ont à peu près mon âge, ils ont tout entendu… j’ai dû ajouter à un moment un : « C’est pas possible que ça continue encore longtemps comme ça !... » quand un des deux hommes a tourné son visage vers moi, et aussitôt, avec sa main droite, a formé tout à coup un « V », le « V » de la Victoire, à mon intention, mais surtout bien sûr à ce qui venait d’être dit et échangé entre Angelina et moi, en rapport avec ce désir immense que tant et tant de personnes ont aujourd’hui de vivre plus, bien plus fraternellement, bien plus les unes avec les autres, dans la bonne entente, joyeusement, dans le respect mutuel, dans le partage et la justice aussi…

Ce « V » dressé vigoureusement m’a procuré le plus grand des plaisirs ! De la force. De l’espérance…

J’ajoute alors, dans la rame, avec beaucoup de tact et de respect à l’attention du voyageur maghrébin : « Oui… ça va changer — Inch’ Allah ». Il me sourit tendrement, avec complicité, et son ami aussi. La vie, c’est ça.

Il n’y a pas de séparation —

Jean-Marie Delthil. 17 janvier 2011.


Publié dans J. M. Delthil

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
P
<br /> <br /> Bonjour,<br /> <br /> <br /> Tellement vrai,qu'il ne faut pas séparer,mais l'homme est-il pret à ne pas se la jouer solo ? Pas si sure... C'est trop souvent ce que j'appelle la politique du TPMG (tout pour ma<br /> G....e)Ajoutons à cela que quand vous essayez de l'ouvrir on vous la fait fermer. Essayez de vous mettre dans la rue avec une pancarte "SARKO ESCROC" (par exemple) eh bien vous serez vite<br /> délogé.. Que reste t'il pour faire changer les choses ? Internet ? Oui,si on veut mais !!!<br /> <br /> <br /> Moi si je devais mourir demain je pleurerais sans doute en pensant à ce qui attend ceux qui restent <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
B
<br /> <br /> Vous alors !!!!<br /> <br /> <br /> Quelle inspiration !<br /> <br /> <br /> Quelle respiration sur le net !<br /> <br /> <br /> Quelle envie vous donner de croire encore et toujours !<br /> <br /> <br /> D'accord : le voyageur au V y est pour quelque chose... ANgélina aussi d'ailleurs, mais ce genre de petits événements quotidiens est le véritable souffle dont le monde a besoin.<br /> <br /> <br /> Le monde intérieur et le monde extérieur qui ne sont pas séparés, c'est une clé importante de l'univers d'Etty Hillesum, cette juive hollandaise qui nous a laissé un journal spirituel<br /> extraordinaire. D'ailleurs, on fête les 70 ans du débuit de son journal. Aujourd'hui 21 mars, par exemple, elle écrivait :<br /> <br /> <br /> "Mais aujourd'hui, où chaque minute est pleine de vie, d'expériences, de lutte, de victoires ou de rechutes suivies d'un retour à la lutte,<br /> aujourd'hui je ne pense plus à l'avenir : il m'est indifférent de faire des grandes choses, parce que j'ai l'intime conviction que de la<br /> réussite ou de l'échec il sortira toujours quelque chose.  (...). Aujourd'hui, à la minute présente, je vis, je vis pleinement, la vie vaut<br /> d'être vécue et si j'apprenais que je dois mourir demain, je dirais : dommage, mais je ne regrette rien. " (Etty Hillesum, 21 mars 1941)<br /> <br /> <br /> Bruno<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> <br /> Un grand merci Bruno pour cette page lue de Etty Hillesum. Jean Marie Delthil, l'auteur du texte, va savoir apprécier, ainsi que tous les autres lecteurs.<br /> <br /> <br /> Amicales salutations.<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> un article qui nous parele d'une petite tranche de vie finalement peu banale, optimiste ; ce V de la vistoire, ces paroles échangées, contrauirement au mutisme, contribuent ainsi que de<br /> petits actes de courage à un monde où l'onn'est pas séparé.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
M
<br /> <br /> Ainsi, la ville n'est plus le lieu de l'indifférence anonyme.<br /> <br /> <br /> <br />