Une critique chrétienne du consumérisme
William Cavanaugh
Être consommé, une critique chrétienne du consumérisme, éditions de l’Homme Nouveau, 2007.
Le refus de la surconsommation, ligne des objecteurs de croissance, serait-il très présent dans la droite catholique française ?
Quand on m’a passé ce livre à lire, j’ai tout d'abord été surpris de voir l’éditeur publiant ce titre contre la consommation. Il me semblait que la tendance proche des milieux anarchistes et de l'ultra gauche américaine (Dorothy Day) ne soit pas celle de la ligne éditoriale de l’Homme Nouveau.
William Cavanaugh n’interroge pas, sauf erreur de ma part, le capitalisme à sa racine. Mais est-ce possible, si le système du libre marché existe depuis les civilisations babyloniennes ? Il veut moraliser l’économie de marché. « J’étudie, écrit-il à la page 18, quelques pathologies du désir dans les économies contemporaines du « libre marché », et j’expose la vision positive que la dynamique du désir du Christ tout à la fois forme et est formée par des pratiques économiques alternatives ». Il ne souhaite ni bénir ni maudire « le libre marché » ; mais « attirer l’attention sur les tentatives chrétiennes concrètes de discerner et de créer des pratiques, des espaces et des transactions économiques qui soient vraiment libres ». Peut-on qualifier cette démarche de type : « Démocratie chrétienne » ?
Ceci, je partage totalement son interrogation fondamentale. Pour obtenir quelques résultats, il faut, en effet, « s’interroger pour déterminer si une certaine forme une certaine forme de renoncement ne serait pas à la base de ce projet ». Personnellement, je ne m’interroge pas. Pour l’Occident et les pays industrialisés suite aux colonisations, j’affirme qu’une forme de renoncement est nécessaire. Si l’homme n’opte pas volontairement pour cette démarche à suivre, l’avenir lui imposera.
Je vous invite donc à lire ce petit ouvrage. Je le fais en vous communiquant ma triple interrogation.
-1 Si le travail se situe dans la ligne de la vulgarisation, je me demande comment un lecteur peu formé en théologie pourra saisir les allusions aux grands théologiens. L’esthétique de Hans Urs von Balthasar n’est pas facile à saisir. Délicate aussi la comparaison d’une mauvaise compréhension du Christ avec l’arianisme.
-2 Si le travail s’adresse non à un large public, mais à des spécialistes en anthropologie théologique, les citations ou allusions aux auteurs ne sont pas suffisamment introduites. Pour moi, il ne suffit pas de citer la théologie d’un théologien, par exemple de Lubac, sans indiquer largement la place de la citation dans son œuvre.
Serais-je trop marqué par une démarche théologique hyper classique dont s’est libérée la jeune théologie laïque américaine ?
- 3 Un exemple de figure chrétienne choisi par William Cavanaugh appartient, à un même milieu que l’on ne remarque pas comme cherchant, sinon à s’opposer au néo-capitalisme, du moins à le moraliser. Je cite le projet d’Économie de Communion du mouvement des Focolari. Il faudrait aussi citer les ouvrages de la Radical Orthodoxy que semble ne pas trop bien connaître la littérature théologique européenne.
Le fait que de nombreux articles soient publiés à la Nef interroge également, surtout quand on voit qu’un des ecclésiastiques réguliers à la revue est l’Abbé Gouyaud, membre actif de Totus Tuus, qui met en place un séminaire prenant en compte la théologie du Concile de Trente.