Art actuel. Il ne s’agit pas de copier des œuvres catéchétiques du XIXe s., mais une catéchèse peut se manifester par des effets de lumière

Publié le par Michel Durand

YOLAINE WUEST, Biennale d'art sacré actuel, Lyon, chapelle Saint Marc, 2019.

YOLAINE WUEST, Biennale d'art sacré actuel, Lyon, chapelle Saint Marc, 2019.

Voir le site de Yolaine Wuest. 

Avec l’association Confluences puis Résurgences j’ai eu l’occasion de rencontrer de nombreux artistes plasticiens tout heureux de montrer leurs créations dans les lieux spécifiques, sacrés, que sont les églises et les chapelles. Œuvres à dimension spirituelle, souvent non catéchistiques, mais pleins de sens de la vie humaine. Parfois des provocations. Le visiteur spectateur ne reste jamais indifférent.

Du reste, ce sont les artistes eux-mêmes qui ont sollicité notre aide pour exposer dans de tels espaces sacrés leurs œuvres qui ne trouvaient pas place dans le cadre des galeries d’art ou espace commercial d’exposition.

Je suis content d’avoir lu cet article dans le quotidien La Croix (26/11/20), aussi je le propose à la lecture en ce lieu.

 

L’art contemporain peut avoir du sens dans une église

 

Père Thibaud de La Serre, curé de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), diplômé de l’École du Louvre, chargé de la commission d’art sacré du diocèse d’Agen

 

Il est normal que les générations successives ajoutent leur patte à des monuments du patrimoine ou à des bâtiments importants, et bon nombre d’entre eux portent des traces de différentes époques. Cela ne me choque pas de trouver des vitraux d’époques différentes dans des églises romanes ou d’en voir certaines largement remodelées au XIXe siècle. Ainsi, la cathédrale romane d’Agen possède des vitraux de Joseph Villiet, maître de l’école du vitrail de Bordeaux du XIXe siècle.

Dans une église, une œuvre contemporaine peut avoir du sens dès lors que l’on respecte la symbolique du bâtiment et que l’on n’oublie pas qu’elle accueille d’abord des fidèles et des priants, et pas seulement des visiteurs. Il faut donc se demander en quoi cette œuvre va les aider à prier. Il ne s’agit certes pas de copier des œuvres catéchétiques du XIXe siècle, mais une catéchèse peut se manifester par des effets de lumière.

Le clergé affectataire étant seul utilisateur – avec les fidèles – des églises, il est normal qu’il fasse partie de l’élaboration des projets. Mais souvent le clergé n’a pas trop voix au chapitre, car les choix sont faits par l’État payeur et donc commanditaire. Je pense à la petite église paroissiale de Bonaguil (Lot-et-Garonne) dont les vitraux du XIXe ont été remplacés par des vitraux modernes, payés par le Fonds régional d’art contemporain (Frac) : le résultat est assez réussi, même si le clergé local n’a que tardivement été associé au projet.

Néanmoins, à propos des vitraux des chapelles adjacentes de Notre-Dame de Paris, je serais d’avis – comme la ministre Roselyne Bachelot – de ne pas y toucher puisqu’ils sont restés en bon état ; cela serait différent s’ils avaient été abîmés ou détruits par l’incendie. Le projet en cours pour l’aménagement futur de Notre-Dame doit poursuivre l’histoire du monument et rendre intelligible, au XXIe siècle, la foi qui a conduit à édifier ce chef-d’œuvre.

De même, en ce qui concerne le mobilier liturgique, il s’agit de respecter le lieu. Quant aux bancs, ils doivent rester discrets pour que l’œil se concentre sur le plus important, à savoir l’autel. Entendre parler, pour Notre-Dame, d’éventuels bancs lumineux est un peu choquant, car une telle somme d’argent pourrait être utilisée pour autre chose.

Je ne fais pas partie de ceux qui, considérant à juste titre que le christianisme est une religion de l’incarnation, défendent à tout prix le figuratif dans l’art sacré. L’art contemporain abstrait peut aussi être très signifiant. Mais l’art sacré ne doit pas être systématiquement abstrait et non figuratif, au risque sinon de ne plus oser se confronter à la représentation du visage humain, comme cela semble être le cas depuis les folies meurtrières du siècle dernier qui ont tellement défiguré l’homme. Peut-être est-ce justement à l’art chrétien d’aider les artistes à retrouver la beauté du visage ?

Recueilli par Claire Lesegretain, La Croix, 26 novembre 2020.

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