Plutôt que de tenter d’expliquer Marc 9, je garde tout son mystère. Se situer devant la transfiguration dans une attitude d’accueil

Publié le par Michel Durand

Transfiguration du Christ, Giovanni Bellin, vers 1480, Museo di Capodimonte, Naples

Transfiguration du Christ, Giovanni Bellin, vers 1480, Museo di Capodimonte, Naples

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Suite de mes lectures d’Évangile avec l’évangéliste Marc. J’aborde le chapitre 9. Pour la page précédente (ch. 8) venir ici.

Et la première page de cette lecture se trouve en suivant ce lien. Quand cette lecture -étude d’Évangile- sera terminée, je donnerai l’ensemble dans un livret de type PDF. Les chapitres concernant la Passion du Christ n’entrent pas dans le thème que je me suis donné : Jésus enseigne et fait le bien autour de lui. Cette étude d’Évangile a débuté en janvier 2021. Voir ici.

 

Situations enseignantes

Marc conclut le chapitre 8 en rappelant sa toute première phrase : « commencement de l’Évangile de Jésus-Christ Fils de Dieu ». Jésus, enseignant et faisant le bien autour de lui (il guérit les malades, prends soin des gens…), même s’il occasionne des rivalités qui le conduiront à la mort, ne cache pas qu’il vient de Dieu. Dieu lui-même, il peut accomplir ce que l’imagination humaine ne peut concevoir. Il affirme ainsi que Dieu viendra avec puissance.

Avec la traduction de Chouraqui, nous lisons :

9,1

Il leur dit : « Amén, je vous dis : il en est ici, parmi les présents, qui ne goûteront pas la mort, avant d’avoir vu le royaume d’Elohîms venir dans la puissance. »

La TOB :

Et il leur disait : « En vérité, je vous le déclare, parmi ceux qui sont ici, certains ne mourront pas avant de voir le Règne de Dieu venu avec puissance ».

Difficile à comprendre. Ou à accepter. Plus de 20 siècles après, il n’y a toujours pas de manifestation divine. Combien de générations de morts sans manifestation de gloire divine ; avec puissance ?

La note de la TOB indique que les mots avec puissance « opposent la manifestation triomphale du règne à l’obscurité de ses débuts. Cette puissance est donnée au Christ dès sa Résurrection comme l’indique la lettre de Paul aux Romains : « Fils de Dieu avec puissance par (ou après) sa résurrection d’entre les morts » (Rm 1,4). Avec puissance ! « Ce n’est pas la Résurrection qui a fait de Jésus le Fils de Dieu, mais, à la résurrection, Dieu l’a souverainement élevé (Ph 2,9) et lui a donné la gloire (1P 1,21) et la puissance suprême (Ep 1,20-23) » (Note de la TOB).

Ce passage d’Évangile demeure bien mystérieux et j’avoue aujourd’hui ne pas chercher à la rendre plus crédible. C’est pour quand le retour du Seigneur ? La fin du monde ? L’évènement du Règne de Dieu ? La vision de la gloire divine ? Que la mort du Christ sur un instrument de torture à la romaine, la croix soit une évidence historique n’entraine pas immédiatement l’adhésion à la réalité de la résurrection et de la présence du Royaume de Dieu venu avec puissance.

Mais, n’est-ce pas pour renforcer l’invitation à l'acte de foi que Marc rédige le chapitre 9 avec les récits sur la transfiguration, le dialogue sur Élie avant de rendre compte de la deuxième annonce de la Passion ?

Je donne à lire la Traduction de Sr Jeanne d’Arc.

9,2-13

Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean. Il les fait monter sur une haute montagne, à part, seuls. Il est métamorphosé devant eux : ses vêtements deviennent étincelants, extrêmement blancs, tellement que foulon sur la terre ne peut ainsi blanchir. Leur apparaît Élie, avec Moïse : ils parlaient avec Jésus. Pierre intervient et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici. Faisons donc trois tentes : pour toi une, pour Moïse, une, pour Élie, une. » Car il ne savait que répondre : ils étaient saisis de crainte. Survient une nuée, qui les obombre. Et survient une voix, de la nuée : « Celui-ci est mon fils, l'Aimé : entendez-le. » Et brusquement ils regardent à la ronde : ils ne voient plus personne sauf Jésus, seul avec eux. Ils descendent de la montagne. Il leur recommande : qu'à personne ils ne racontent ce qu'ils ont vu, sinon quand le fils de l’homme se lèverait d'entre les morts. Ils tiennent bien la parole, mais ils discutent entre eux, qu'est-ce que : « Se lever d'entre les morts » ? Ils l'interrogent en disant : « Pourquoi les scribes disent-ils qu'Élie doit venir d'abord ? » Il leur déclare : « Certes, Élie vient d’abord et rétablira tout. Et comment est-il écrit du fils de l’homme qu'il souffrira beaucoup et sera tenu pour rien ? Mais je vous dis : Élie est bien venu, et ils lui ont fait comme ils voulaient, selon qu'il est écrit de lui. »

Voici quelques explications :

Dans les apocalypses juives, « les vêtements resplendissants sont un des signes de la gloire céleste accordée aux élus qui deviennent pareils aux anges. Cette scène mystérieuse ne prend son sens que dans la perspective de la Résurrection glorieuse du Christ » (Note de la TOB). Marc fait de la Transfiguration une anticipation de la Résurrection.

Rabbi se traduit par mon Seigneur. Ce mot désigne quelqu’un de grand, d’instruit. Un Maître.

Obombre. Je ne connaissais pas ce mot. Il existe vraiment dans les dictionnaires : couvrir d’ombre. Ombrager. « Le verbe obombrer, utilisé généralement dans un cadre littéraire, à l'écrit, est employé pour décrire qu'une chose, une personne ou un endroit perd de sa lumière, au propre ou au figuré, et devient plus terne ».

En fait, plutôt que de tenter d’expliquer ce passage de Marc je préfère lui garder tout son mystère. Il me semble important de se situer devant lui dans une attitude d’accueil plutôt que de chercher à la cerner par une exacte connaissance et compréhension. Je me situe face à cette parole comme étant un vase vide et je demande à Dieu de me remplir de son don. Dieu se donne. Pour cela il accepte la souffrance et la mort que lui imposent des Maîtres qui se ferment à la présence divine. Insister sur cette inévitable souffrance est propre à Marc :

9,12-13

Il leur dit : « Certes, Élie vient d'abord et rétablit tout, mais alors comment est-il écrit du Fils de l'homme qu'il doit beaucoup souffrir et être méprisé ? Eh bien ! je vous le déclare, Élie est venu et ils lui ont fait tout ce qu'ils voulaient, selon ce qui est écrit de lui ».

Les souffrances faites aux Fils de l’homme, peuvent être, dit une note de la TOB une allusion aux souffrances du serviteur vu en Isaïe (Is 52,14 ; 53, 4-10) ou à Élie.

« Eh bien ! je vous le déclare, Élie est venu et ils lui ont fait tout ce qu'ils voulaient, selon ce qui est écrit de lui ».

Or, l’Écriture ne parle pas de la souffrance d’Élie. Cette idée est donc bien propre à Marc. La note de la TOB précise : « l’idée selon laquelle Élie précurseur doit souffrir est absente de l’Ancien Testament et n’est pas clairement exprimée dans la littérature juive. Plutôt qu’une allusion possible aux épreuves d’Élie durant sa vie, c’est l’idée originale de Marc  qu’il faut relever. Selon lui, il existe un parallélisme étroit entre Élie et le Fils de l’homme : l’un et l’autre doit souffrir ; le sort de Jean Baptiste préfigure ainsi celui du Christ. Ce thème lui parait qui important qu’il entraîne un appel au témoignage des Écritures.

Voilà l’enseignement que, selon Marc, Jésus a voulu donner. Afin de préparer les disciples aux durs moments de la Passion, il convenait de redire que Jésus est Dieu tout en montrant avec puissance la lumineuse réalité.

Or, ne peut-on qu’enseigner ? Il convient aussi de faire le bien autour de soi : guérison d’un enfant possédé.

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