Plus que jamais, dans la société l’Église a besoin de renoncer à certains avantages et à s’ouvrir aux exclus dans un esprit fraternel, humain

Publié le par Michel Durand

 

 

Suite à notre échange à propos du Chapitre XVI du livre de ChristophTheobald, Le courage de penser l’avenir. Je dépose en cette page, suite à ma communication, deux expressions de « relecture de l’ouvrage

 

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S’entendre dans l’Eglise et dans la société – ch. XVI -Christophe Théobald

On dénonce le cléricalisme. Comment remettre l’Eglise sous le vent de l’Esprit Saint ?

Place du dialogue : moyen nécessaire et fragile. Il entre en Eglise avec Paul VI en 1964.
Ecclesiam suam : peu sensible aux épreuves du vivre-ensemble, trop théorique.

La place de l’individualisme rend le dialogue fragile et peut conduire à la violence.
Cohésion sociale fragile faisant appel aux réflexes identitaires et appel à une autorité forte.
Indifférence à celui qui ne fait pas partie du clan.
Entrée des pauvres dans le dialogue.
Entendre les intérêts d’autrui et réaliser que le dialogue ne relève pas de l’efficacité.

François s’appuie la tradition religieuse, mais prône le dialogue entre pays et cultures.
Dans Jean, avec Nicodème et la samaritaine… Jésus ne craint pas la discussion.
aujourd’hui le dialogue se joue entre le pouvoir et l’autorité.

Cette autorité a besoin de 3 points pour s’exercer : la cohérence, la capacité d’empathie et la référence à autre que soi.
Les abus sexuels détruisent la crédibilité.
Pour avoir un dialogue constructif, il faut une entente de tous et la diversité des participants, ainsi qu’une vigilance par rapport aux exclus.

Jusqu’en 1958, l’infaillibilité du pape n’a pas posé trop de problème. François est obligé d’apporter le dialogue de la synodalité pour redonner de la crédibilité à l’Eglise.

Dans la société l’Eglise a besoin de renoncer à certains avantages et à s’ouvrir aux exclus dans un esprit fraternel.

Monique et Jean-Marc

 

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Voilà un texte qui pose la question difficile et du dialogue et de l’autorité dans le monde et l’Eglise. Voyons ce qu’il dit de général sur l’interaction du dialogue et de l’autorité.

Dans les arguments fouillés de l’auteur on cite en premier l’entente comme condition du dialogue. L’entente a plusieurs sens ; s’entendre c’est-à-dire s’écouter et accueillir les paroles de l’autre. C’est la condition d’un bon déroulement du dialogue et de ne pas tomber dans les risques derrière les intérêts et les convictions où le vivre ensemble de le réduire au combat entre intérêts concurrentiels. La cohésion sociale basée sur le dialogue fait subir une mutation de l’exercice de l’autorité.

Le dialogue est l’axe central du concile Vatican II. L’Église se fait conversation selon l’expression de Paul VI. Le rapport de l’Église au monde nécessite un dialogue adapté à sa situation actuelle : sécularisation, autres confessions chrétiennes, autres religions. Aussi Ch; Theobald décrit les caractéristiques du dialogue : la clarté et la compréhension, la douceur et la confiance, la prudence. Ceci ne doit pas occulter les malentendus liés au vivre ensemble. Aussi la tendance est de s’en remettre dans nos sociétés à des autorités fortes qui assurent la paix, la bienveillance et la prospérité. Le dialogue est-il voué à disparaitre ? Plus que jamais il est nécessaire.

Comme fruit d'un tel dialogue, l'entente consiste alors à compter avec l'apport des « ressources spirituelles » de chacun en vue d'un meilleur vivre-ensemble de tous. Que propose l’Église et le pape François pour stimuler le dialogue social ? le dialogue est une démarche spirituelle qui suppose de répondre à la question : Que sont les exclus de nos entretiens ? Le versant négatif de nos entretiens, sa maladie (du vivre ensemble) est la pauvreté. Le véritable dialogue suppose une conversion radicale, de sortir de soi, c’est un combat spirituel pour tendre vers l’entente idéale. Ainsi s’esquisse une théologie du dialogue. Une mutation s’impose entre l’ancienne Europe patriarcale et autoritaire et la nécessité de la recherche d’entente dans un consensus social qui pose la question de l’autorité.

Pour parler d’autorité Ch. Theobald explore l’autorité telle que la voit Fessard : l’autorité par défaut de ceux qui ont les insignes du pouvoir et l’autorité de celui qui fait autorité. Il explore les critères classiques de l’autorité : la cohérence, la faculté d’empathie, l’insubstitualité de tout être humain (à ne pas noyer dans la sympathie). Nous retrouvons ici l'observation du Père Fessard et l'élément distinctif de l'autorité qui est « le vouloir de sa propre fin ». On peut exprimer ce critère aussi en termes de liberté de l'autorité par rapport à elle-même ou en parlant d'effacement, voire de décentrement par rapport à une transcendance, quelle que soit pour le moment sa figure.

Comment alors retrouver la crédibilité de l’Église qui à travers la crise des abus a vu naître les deux formes de cette autorité, celle par défaut qui tait les faits et protège les auteurs de ces actes et celle du pape François et de quelques autres - porteuse d’autorité libre par rapport à elle-même (en écoutant et en s’effaçant). D'autres pas devront suivre quant à la gouvernance de l’Église. De nouveaux critères de crédibilité sont à trouver. Seule l’entente permet de préserver la cohésion sociale. Il rajoute un quatrième critère qu’il appelle sapientielle, celui en la capacité de l’Église de s’auto-limiter en promouvant la culture du dialogue, de l’entente et de l’écoute. Un cinquième critère d’ordre prophétique est celui de ne pas écarter du dialogue social les exclus et de promouvoir l’hospitalité.

Ce deux deniers critères ne vont pas de soi. En effet le critère de l’entente idéale et l’autolimitation de l’autorité mettent en péril le pouvoir pontifical et l’unanimité doctrinale qui lui est liée. À l’occasion du cinquantième anniversaire de l’institution du synodes des évêques en 2015, François a publié en 2018 une exhortation apostolique sur le synode des évêques où il décrit entre autres la « synodalité, comme dimension constitutive de l'Église, nous offrant le cadre d'interprétation le plus adapté pour comprendre le ministère hiérarchique lui-même » … . Pour les disciples de Jésus, hier, aujourd'hui et toujours, l'unique autorité est l'autorité du service, l'unique pouvoir est le pouvoir de la croix. On retrouve dans le quatrième évangile une approche des 4ème et 5ème critère de l’autorité : l’autolimitation et la non exclusion des exclus du dialogue social.

C'est cette expérience d'écoute qui, selon le pape François, rend possible l'unité de tous les membres de l'Église, leur dialogue et le rôle que doit y jouer l'autorité : « Nous demandons tout d'abord à l'Esprit Saint, pour les pères synodaux le don de l’écoute », a-t-il répété le 17 octobre 2015. Quel service peut rendre l’Église à la société , certes séculière ? Agir dans une attitude de fraternité, l’autorité se meut en exercice de la fraternité. Il implique d’ouvrir l’autorité aux critères vraiment théologaux cités de la fraternité : entente, écoute de tous et surtout les exclus du dialogue. C’est en œuvrant dans le concret de nos sociétés et non en attendant de tel ou tel pouvoir que l’Église peut rendre crédible son sens théologal cité du dialogue fraternel et en mettant en avant des témoins de ce dialogue.

Bernard

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