La liberté : se laisser guider par l’Esprit, en renonçant à vouloir calculer et contrôler tout… permettre à l’Esprit de nous éclairer, nous guider

Publié le par Michel Durand

Christian Delorme

Christian Delorme

Source de la photo, Le Monde, 5 mai 2017

Je demeure persuadé qu’Emmanuel Macron sera élu pour un second mandat. Et je me demande ce qu’il convient de faire pour que les « votes utiles » qu’il recevra - barrer la route à Marine Le Pen - ne le confirme pas dans la position qu’il a reçu toute la confiance du peuple français. Il convient d’agir pour que Macron ne puisse pas se croire pas investi de pleins pouvoirs. Le vote « blanc » me semble bien venu pour que le futur président Macron ne se sente pas porté par une écrasante majorité. Et alors, si Le Pen passait ?… Je ne peux que penser aux années 30 du XXe siècle. Hitler est légalement arrivé au pouvoir, voulu par le peuple. Ce sera un appel, une obligation à vraiment réviser nos systèmes démocratiques. Mettre en premier les appels des pauvres et la protection de la Terre, de l’univers cosmique. Ouvrir vraiment l’Évangile pour le « mettre en pratique ».

Ce genre de réflexion, je l’ai avec des confrères. Quelle parole adresser à des paroissiens dont nous ressentons bien l’orientation droitière dans ses extrêmes. Quel dialogue avec des confrères qui reprennent des jugements entendus dans les rangs à l’extrême droite, par exemple à propos de la présence des migrants en Europe ? À la fin de la page de cette édition, je déposerai le texte d’une invitation à révision de vie à ce propos. Auparavant, je donne à lire la tribune de Christian Delorme, publié dans Le Monde.

 

« Que les évêques de France disent qu’aucune voix chrétienne ne doit aller à l’extrême droite le 24 avril ! » : l’appel du père Christian Delorme

 

Alors que le christianisme est transformé par une partie de l’extrême droite en « idéologie de haine et d’exclusion », le prêtre du diocèse de Lyon appelle les évêques à se prononcer en faveur d’Emmanuel Macron, sans lui donner un blanc-seing.

 

Tribune. Le Monde.

 

Triste répétition : voici cinq ans déjà, en mai 2017 et dans Le Monde déjà, je m’autorisais – sans succès ! – à en appeler à une parole publique de la part des évêques de France pour que ceux-ci affirment collectivement qu’un vote en faveur d’un(e) candidat(e) d’extrême droite est incompatible avec la foi chrétienne. Me voilà condamné à réitérer aujourd’hui cet appel, alors que, davantage qu’en 2017, la candidate Marine Le Pen a la possibilité de remporter cette élection présidentielle.

Mon appel n’a guère de chance d’être entendu – qui suis-je, d’ailleurs, pour prétendre avoir le droit d’être entendu ? –, mais je peux néanmoins espérer que quelques évêques oseront une parole claire, avant le dimanche du choix décisif. Je sais, aussi, que beaucoup de catholiques, laïcs, religieux (ses) et prêtres, ont (heureusement !) les mêmes attentes que moi.

Une « contre-offensive » chrétienne

Les chiffres du premier tour de l’élection présidentielle sont terrifiants : selon une étude de l’IFOP pour le quotidien La Croix, si on cumule les scores de Marine Le Pen, d’Éric Zemmour et de Nicolas Dupont-Aignan, 40 % des catholiques pratiquants ont voté pour l’extrême droite ! C’est là un échec considérable pour l’Église et pour le christianisme en général. Comme l’échec terrible que représente, pour la démocratie française, cette confiance que tant de citoyens français croient pouvoir mettre désormais dans des personnes prônant des valeurs contraires aux fondements mêmes de cette démocratie.

Face à des mouvements migratoires qui appartiennent à l’histoire naturelle du monde, mais dont la réalité est fortement travestie, et par peur de l’essor, dans notre société comme dans le monde entier, d’un islam de plus en plus prégnant, une partie de l’extrême droite en appelle, manifestement avec succès, à une sorte de « contre-offensive » chrétienne… dans une société majoritairement déchristianisée.

« Cette “extrême-droitisation” du catholicisme français représente une tragédie au moins aussi affligeante que l’ultra-déchristianisation de notre société »

Mais de quel christianisme s’agit-il ? Certainement pas d’un christianisme se référant au témoignage de Jésus de Nazareth, lui qui a prêché l’accueil de l’étranger, la fraternité universelle ! Il s’agit d’un christianisme sans Jésus ! Il s’agit d’un christianisme transformé en idéologie de haine. D’un christianisme de l’exclusion de l’autre. Autrement dit : d’un christianisme perverti, d’une hérésie contemporaine. D’une instrumentalisation politique du christianisme comme il n’en a pas manqué au cours de l’histoire, et comme en témoigne aussi de nos jours l’actuel patriarche orthodoxe de Moscou encourageant et bénissant l’agression russe contre l’Ukraine.

Cette « extrême-droitisation » du catholicisme français représente une tragédie, au moins aussi affligeante (pour un chrétien, en tout cas !) que l’ultra-déchristianisation de notre société. Contrairement à ce que croient les promoteurs du retour à un catholicisme identitaire, qui comptent faire ainsi revivre le message chrétien en France, ce qui est en train de se passer va accélérer plus encore la déchristianisation du pays, car on ne saurait sauver le message en le trahissant ou en l’édulcorant. Je ne sais si des évêques prendront le noble risque de dire cela ces prochains jours, mais en tout cas, il y a dans cette dérive massive un urgent sujet de réflexion pour les théologiens autant que pour les pasteurs !

Autorité morale affaiblie

On sait pourquoi, en 2022 comme en 2017, les évêques catholiques de France, réunis le 6 avril à Lourdes, se limitent à un appel au discernement personnel et en conscience des catholiques, sans nommer le mal et le danger. L’horreur et l’ampleur des crimes pédophiles dans l’Église ont considérablement affaibli l’autorité morale de cette dernière. On peut comprendre que les évêques hésitent désormais à se poser en donneurs de leçons. Dans une société de moins en moins encline à prêter attention à des recommandations ou à des diktats d’origine religieuse, les évêques peuvent également craindre de se voir accuser d’atteinte à la laïcité (ce que ne manquera pas de dire Marine Le Pen s’ils osent une parole !).

Quand bien même ceux qui, parmi eux, sont susceptibles de voter à l’extrême droite se comptent sur les doigts d’une main, on sent également une crainte, dans l’épiscopat, de toute division interne. Il y a, pareillement, la peur de déchirer les communautés chrétiennes, et même la peur de devoir faire face à la fronde – ou à la désertion – d’une part importante des forces militantes actuelles du catholicisme français, qui s’inscrit de plus en plus dans cette dynamique du catholicisme identitaire.

Pourtant, dans d’autres domaines, comme les sujets dits « sociétaux » (mariage ouvert aux personnes homosexuelles, euthanasie, avortement…), les évêques semblent moins soucieux de ne pas se montrer clivants. Cela signifierait-il que, pour eux, l’allongement des délais pour avorter, ou l’accès volontaire à l’euthanasie seraient plus graves que la mise en péril de notre système démocratique et de la construction européenne ? Je ne peux le croire !

Il faut que les évêques de France, au moins les plus courageux d’entre eux, sachent dire : « Aucune voix chrétienne ne doit aller, dimanche 24 avril 2022, à l’extrême droite ! » Il faut, en tout cas, qu’une majorité de baptisés et de prêtres le crient haut et fort. Appeler à voter, du même coup, pour le président sortant ne signifie pas, pour autant, donner à celui-ci un nouveau blanc-seing. Il y a dans ce pays trop de souffrances, trop d’inégalités, trop de colères pour que ce qui fait système depuis maintenant tant de décennies continue de la même façon. Mais les deux candidatures ne sont pas comparables. L’une n’est pas fermée à davantage d’humanité, l’autre nous conduit au chaos.


Christian Delorme est prêtre du diocèse de Lyon. Très engagé auprès des migrants, il a été un des initiateurs de la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983. Il est l’auteur, avec Rachid Benzine, de « La République, l’Église et l’islam » (Bayard, 2016).

 

 

 

Pour notre rencontre d’équipe pradosienne

 

Je pense à ces passages de Evangelii gaudium

259. Évangélisateurs avec esprit veut dire évangélisateurs qui s’ouvrent sans crainte à l’action de l’Esprit Saint. À la Pentecôte, l’Esprit fait sortir d’eux-mêmes les Apôtres et les transforme en annonciateurs des grandeurs de Dieu, que chacun commence à comprendre dans sa propre langue. L’Esprit Saint, de plus, infuse la force pour annoncer la nouveauté de l’Évangile avec audace, (parresia), à voix haute, en tout temps et en tout lieu, même à contre-courant. Invoquons-le aujourd’hui, en nous appuyant sur la prière sans laquelle toute action court le risque de rester vaine, et l’annonce, au final, de manquer d’âme. Jésus veut des évangélisateurs qui annoncent la Bonne Nouvelle non seulement avec des paroles, mais surtout avec leur vie transfigurée par la présence de Dieu.

280. Pour maintenir vive l’ardeur missionnaire, il faut une confiance ferme en l’Esprit Saint, car c’est lui qui « vient au secours de notre faiblesse » (Rm 8, 26). Mais cette confiance généreuse doit s’alimenter et c’est pourquoi nous devons sans cesse l’invoquer. Il peut guérir tout ce qui nous affaiblit dans notre engagement missionnaire. Il est vrai que cette confiance en l’invisible peut nous donner le vertige : c’est comme se plonger dans une mer où nous ne savons pas ce que nous allons rencontrer. Moi-même j’en ai fait l’expérience plusieurs fois. Toutefois, il n’y a pas de plus grande liberté que de se laisser guider par l’Esprit, en renonçant à vouloir calculer et contrôler tout, et de permettre à l’Esprit de nous éclairer, de nous guider, de nous orienter, et de nous conduire là où il veut. Il sait bien ce dont nous avons besoin à chaque époque et à chaque instant. On appelle cela être mystérieusement féconds !

I. Quelques défis du monde actuel

52. L’humanité vit en ce moment un tournant historique que nous pouvons voir dans les progrès qui se produisent dans différents domaines. On doit louer les succès qui contribuent au bien-être des personnes, par exemple dans le cadre de la santé, de l’éducation et de la communication. Nous ne pouvons cependant pas oublier que la plus grande partie des hommes et des femmes de notre temps vivent une précarité quotidienne, aux conséquences funestes. Certaines pathologies augmentent. La crainte et la désespérance s’emparent du cœur de nombreuses personnes, jusque dans les pays dits riches. Fréquemment, la joie de vivre s’éteint, le manque de respect et la violence augmentent, la disparité sociale devient toujours plus évidente. Il faut lutter pour vivre et, souvent, pour vivre avec peu de dignité. Ce changement d’époque a été causé par des bonds énormes qui, en qualité, quantité, rapidité et accumulation, se vérifient dans le progrès scientifique, dans les innovations technologiques et dans leurs rapides applications aux divers domaines de la nature et de la vie. Nous sommes à l’ère de la connaissance et de l’information, sources de nouvelles formes d’un pouvoir très souvent anonyme.

Non à une économie de l’exclusion.

  • On recommande l’importance de suivre le Christ, d’agir dans l’écoute de l’Esprit Saint.

On indique l’importance de vivre avec les gens. Ne pas être en surplomb.

N’est-ce pas antinomique ?

J’imagine pour notre rencontre d’équipe Prado, une sorte de révision de vie concernant notre attitude face aux élections.

Comment sommes-nous électeurs ? Quel dialogue avec nos contacts à ce sujet ?

Quels sentiments exprimons-nous devant le constat que nombre de catholiques sont proches de l’extrême droite politique partisane ? Voir ici   et   ici  .

 

 

 

L’écologie (sobriété) (3%) est bien loin devant le pouvoir d’achat. Que vivons-nous dans notre témoignage selon l’Évangile face à l’attitude des chrétiens pratiquants rencontrés ? Voir ici  .

 

 

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